Хайр

Mongolie

* "amour" en Mongol

" Je t'aime "
Quelques précisions sur cette langue

Les langues mongoles sont un groupe de langues parlées en Asie centrale, souvent rapprochée des langues turques et toungouses au sein de la famille des langues altaïques, mais cette approche n’est pas universellement acceptée.
Le membre le plus connu de cette famille de langue, le mongol (dans l’orthographe cyrillique utilisée en Mongolie, Монгол Хэл, et en écriture ouïghoure utilisée en Chine en Mongolie-Intérieure, Mongγol Kele), dit aussi khalkha, est la première langue de la plupart des habitants de la Mongolie, et est parlée par environ 5,7 millions de personnes en Mongolie, en Chine et en Russie.

Quelques références littéraires et cinématographiques

CINÉMA

Si tout le monde connaît le nom de Gengis Khan – fondateur de l’immense empire mongol allant de l’océan Pacifique jusqu’à l’Europe, il y a huit siècles – peu d’entre nous connaissent la Mongolie, vaste pays au cœur des steppes sauvages et des déserts d’Asie centrale, dont l’immensité s’est réduite au fil de l’histoire. En effet, ce pays a subi une division dans les années 1910 : l’actuelle Mongolie avec pour capitale Oulan-Bator et la Mongolie-intérieure, une région autonome chinoise. De la tutelle chinoise (du XVème siècle jusqu’à 1911), la Mongolie est passée sous celle de la Russie (1920-1989), détail important car il permet d’expliquer les débuts de l’histoire du cinéma mongol qui commence dans les années 1920. Cette époque de la victoire de la révolution communiste en Mongolie est suivie d’une longue période de troubles dans le domaine politique. Si la première projection a lieu dès 1903 ce n’est qu’en 1935 que le Parti populaire Mongol crée les premiers studios Mongol Kino, assistés par des techniciens russes. Ce sont essentiellement des films moralistes et de propagande qui sont produits, le cinéma étant considéré comme un outil idéal pour éduquer la population avec des projections itinérantes. Du Chemin de Norjmaa (1938) de Temet Natsagdorg (premier film d’un réalisateur mongol), jusqu’à la Perle des bois (2012) en passant par Le Chien jaune de Mongolie (2006), les réalisateurs mongols, formés à la célèbre école de cinéma d’Etat russe V.G.I.K, nous content l’histoire de leur pays. Entre tradition et modernité, ils ont du mal à trouver leur place, beaucoup d’entre eux restent attachés à présenter l’authentique Mongolie sachant que celle-ci ne perdurera pas. Depuis les années 2000 le cinéma mongol connaît un renouveau avec de jeunes réalisateurs, mais rares sont ceux qui ont l’occasion de se faire connaître à l’étranger, à l’exception de la talentueuse réalisatrice Byambasuren Davaa, récompensée dans de nombreux festivals. Si aujourd’hui la Mongolie est libre, en revanche son identité est plus que jamais menacée.

GARID MAGNAI (L’AIGLE FIER, LE LUTTEUR)

JAMAYANGUYN BUNTAR (1983)

B. Batdoy, D. Atlanguerel, B. Magar, R. Damdinbazar

Nous sommes au XIXè siècle. Le jeune Delaï Tseren possède une force herculéenne, aussi a-t-il envie d’être initié à la lutte traditionnelle mongole. Il se met en route, parcours les vastes espaces, va de lieu en lieu à la recherche d’un maître. Le hasard le met sur le chemin d’Ochin Zaan, un lutteur célèbre, qui accepte de le former. L’élève est vite remarqué et rapidement il acquiert une renommée. Lors du Nadaam, la célèbre fête traditionnelle où les hommes concourent dans trois disciplines, la lutte, l’équitation et le tir à l’arc, Delaï Tseren rencontre la belle Udval, dont il tombe amoureux. Mais leur amour s’avère impossible. Elle est la fille d’un seigneur noble, promise en mariage à quelqu’un de son rang, le fils d’un seigneur fortuné.

SUUDER (L’OMBRE)

BEGZLIN BALJINNYAM (1986)

D. Suren, G. Ravdan

L’histoire se déroule dans les années 1930. Tsével, veuve depuis la guerre, vit seule avec son fils Santag qu’elle élève. Elle a une liaison avec Dougar, le grand ami de son mari, et souhaiterait vivre avec lui. Mais sa famille s’y oppose et son fils ne veut pas l’accueillir chez eux. Il s’est mis en tête que Dougar a assassiné son père pour faire la cour à sa mère et l’épouser.

TENGENRIIN SAHIL (SELON LA VOLONTÉ DU CIEL)

CHYOMBOLIS JUMDAAN (1991)

B. Erdenetsetseg, H. Ochirbat, A. Soninsaikhan, O. Ojun

L’histoire se passe au XIXè siècle. Un peintre, père de trois enfants, se sait condamné et avant de mourir il remet à son fils et à ses deux filles une amulette qu’il suspend à leur cou. Les enfants sont séparés et grandissent sans se revoir. Un jour le frère tombe amoureux d’une jolie jeune fille qui partage les mêmes sentiments. Soudain elle découvre, trop tard, qu’il porte une amulette, l’homme qu’elle aime n’est autre que son frère. Pour expier leur péché, ils décident de travailler sans relâche.

KHUIN KHOLBO (LE LIEN MATERNEL)

JIGJÏDIIN BINDER (1992)

Tovuu et Burmaa ont grandi ensemble et sont des amis d’enfance très proches. Quand Tovuu décide de se marier avec Yangin, Burmaa est déçue et profondément triste. De plus, elle perd accidentellement la vue. Tovuu – qui ne veut pas que Burmaa reste seule, désire qu’elle ait un enfant pour l’aider et veiller sur elle – décide d’avoir un enfant avec elle. Mais Burmaa devenue mère est désemparée pour élever son enfant et, faute de moyens, elle choisit de partir vivre seule ailleurs. Elle le confie son petit à Tovuu, Yangin veillera sur lui comme sur son propre enfant.

ALDAS

CHYOMBOLIS JUMDAAN (1994)

Elevé dans la tradition mongole par son grand-père Tamir, un jeune boxeur, quitte son village pour se rendre à Oulan-Bator où il intègre l’équipe de boxe de Mongolie qui s’apprête à partir en tournée en Europe. Bold, l’entraineur, a une fille Sarangua qui trouble Tamir au point de le détourner de sa préparation sportive, alors que certains voient en lui une graine de champion. Issue d’une famille privilégiée, Sarangua traîne avec une bande de jeunes gens d’un tempérament plutôt provocateurs et attirés par la vie occidentale. Tamir, vulnérable, se laisse aller à boire et à sortir. Bold le met en garde sur son comportement, mais il continue à négliger son entrainement. Amoureux, Tamir reste sourd à la mise en garde de Bold, comme sa fille d’ailleurs, et l’équipe partira sans lui en Europe.

L’HISTOIRE DU CHAMEAU QUI PLEURE

BYAMBASUREN DAVAA (2003, Oscar du meilleur documentaire)

Au cœur de l’été une famille de nomades aide un troupeau de chamelles à mettre bas. L’une d’elle est en difficulté et quand la naissance arrive enfin à son terme, la chamelle se désintéresse de son bébé. Comme elle refuse de l’allaiter, la famille désemparée a recours à une tradition mongole. Elle fait appeler un violoniste destiné à sensibiliser la chamelle pour qu’elle aime son chamelon qui pourrait mourir. La cinéaste s’est inspirée d’un rituel que lui racontaient ses grands-parents quand elle était petite : une mélopée monocorde chantée débutait doucement au crépuscule, accompagnée de gestes, d’un violon à tête de cheval ou d’une flûte, pour aider les chamelles à mettre bas et à donner toute l’affection et le lait nécessaires à son petit. Ce très beau film a contribué à faire connaître le cinéma mongol auprès du grand public. Premier film de la réalisatrice, tourné dans le désert de Gobi avec des acteurs (non professionnels) qui jouent leur propre rôle.

LE CHIEN JAUNE DE MONGOLIE

BYAMBASUREN DAVAA (2006)

Inspiré d’un conte La Cave du chien jaune de Gantuya Lhagva – Urjindorj Batchuluun (le père), Buyandulam Daramdadi (la mère) Nansal Batchuluun (Nansa, la fille ainée) Nansalmaa Batchuluun, (la fille cadette), Babbayar Batchuluun (le fils), Tsrenpuntsag Ish (la vieille dame)

Nansa, une petite fille de 6 ans, vit au Nord de la Mongolie au sein d’une famille nomade, éleveurs de moutons. Un jour, allant ramasser des bouses de yacks pour préparer le feu, elle trouve un chien apeuré dans une grotte. Elle le ramène chez elle, mais son père ne veut pas le garder pensant qu’il pourrait leur porter malheur. Nansa, tellement déçue, ne veut pas l’abandonner et décide de le cacher. Arrive le jour où la famille doit plier bagages et partir, Nansa ne voit pas d’autre solution que de lui dire adieu. En route, le dernier-né de la famille, n’est pas là. Affolés ils font demi-tour et le trouve sauvé d’une attaque de vautours grâce au chien. Le père ne considère plus l’animal comme une malédiction, et l’accepte dans la famille. Une belle histoire d’enfant, complice d’un animal avec lequel il partage une tendre amitié, un amour pur, sincère et touchant, un lien qui participe au développement de sa vie affective et l’aide à se construire. Ce film présente des similitudes avec le précédent, même décor avec une véritable famille de nomades dont on perçoit la fragilité du mode de vie en voie d’extinction. Le film nous montre le rapport extraordinaire des nomades et de la nature, ainsi que leur croyance à un cycle de vie par la réincarnation comme le dit le père au début du film : « Tout le monde décède mais personne ne meurt »

 

MOILKHON (LA PERLE DES BOIS)

ENKHTAIVAN AGVAANTSEREN (2008)

Bayarmaa Baatar (Sendem), Zolboot Gombo (Markhaa), Narankhuu Khatanbaatar (Dugar), G. Altanshagai (Sodnom)

Rappelons certains événements pour situer le film dans son contexte historique. Horloogiyn Choybalsan – principal dirigeant du régime communiste de la République populaire mongole de 1929 à 1952 – est un fidèle de la politique de Staline. Sous son règne le pays connaît de nombreuses purges, la collectivisation des terres et des troupeaux, l’interdiction du lamaïsme, la destruction des temples bouddhistes et l’élimination des moines. Ces terribles années noires entrainent une insurrection générale réprimée par l’Armée populaire.

L’histoire se déroule à Dadal, un village bouriate (ethnie et langue mongoles) situé dans la province de Khentii au Nord-Est de la Mongolie. Sendem, une ravissante jeune femme à l’allure altière, rayonne d’autant plus par sa beauté que les temps ici sont durs. Maarkha, de retour dans son village natal, y revient en tant qu’espion du gouvernement. Subjugué par Sendem il veut la courtiser mais, déjà fiancée, il comprend qu’un amour avec elle est impossible. Cette situation sans issue le conduit à mener avec une détermination féroce l’attaque du village : une manière d’user de ses pouvoirs et d’obtenir par la force ce qu’il ne peut gagner, le cœur de Sendem. Cette dernière met ses espoirs dans un pendentif que lui a remis son fiancé, une perle qui brille de tous ses feux, et qu’elle dépose à l’abri dans une sombre forêt. Une histoire forte et poignante, l’un des premiers films à parler sans détour de la période des années 1930 et de l’impact du communisme soviétique sur la Mongolie. Pour le cinéaste, ces événements s’étant déroulés dans sa région natale, il lui apparaissait d’autant plus important d’évoquer ce pan de leur histoire.

LITTÉRATURE

Je saisis l’occasion de l’ouverture de cette page sur la littérature mongole pour vous annoncer une grande nouvelle : loin, très loin, des gens un peu fous croient encore à l’avenir du livre. À l’heure ou tant de librairies ferment et ou tant de personnes – trouvant tellement plus facile d’acheter leurs livres sur internet – participent à leur disparition, je suis heureuse de vous présenter Sébastien Marneur qui n’a pas hésité à se lancer un défi : ouvrir une librairie française à Ulaanbaatar (Oulan-Bator), capitale de la Mongolie. Incroyable mais vrai ! J’avais eu connaissance de l’étonnante fratrie Marneur – en rencontrant l’un des frères de Sébastien qui tient une insolite brocante mongole en Normandie – à l’occasion d’un livre que je rédigeais Eure, 100 lieux pour les curieux. Cette librairie porte le joli nom de « Papillon », un clin d’œil à notre cher Balzac et au peignoir d’Anastasie de Rastaud – une importante figure féminine de la Comédie humaine et plus précisément du Père Goriot – qui a un mari, Eugène, et un amant Maxime de Trailles : « Sans attendre la réponse d’Eugène, madame de Rastaud se sauva comme à tire-d’aile dans l’autre salon, en laissant flotter les pans de son peignoir qui se roulaient et se déroulaient de manière à lui donner l’apparence d’un papillon ; et Maxime la suivit. Eugène furieux suivit Maxime et la comtesse. » Mais Papillon c’est aussi le nom d’une maison d’édition qui s’est lancée dans la traduction d’œuvres de Alphonse Daudet, Emile Zola, Georges Simenon, Jean de Pan Carpin, et de l’étonnante voyageuse Alexandra David-Néel (première femme à s’être rendu à Lhassa au Tibet travestie en homme dans les années 1920), un salon du livre annuel et une émission de télévision hebdomadaire sur la littérature mongole. Jérôme Garcin (écrivain et journaliste littéraire au Nouvel Obs) invité au salon d’Oulan-Bator en 2010 écrivait : « L’éditeur Jean-Claude Fasquelle a remis un prix à une enseignante qui initie les Mongols à la langue de Molière. Et les projets littéraires franco-mongol se sont multipliés autour d’un feu de joie dans la steppe des yacks et de Galsan Tschinag pour une nuit chamanique arrosée au lait de jument fermenté. » Sébastien Marneur c’est encore : « une caravane du livre qui a sillonné le pays, en 2012, avec quinze chameaux et six yacks. Un périple de quatre mois entre Oulan-Bator et l’Altaï, qui s’arrêta tous les cent kilomètres et dressa un camp de yourtes et de livres au milieu de nulle part. » (Thierry Gandillot, Les Échos 2/12/2011). Cette croisée entre la littérature mongole et française est une riche initiative et faire vivre le livre au milieu de nulle n’est-ce pas un challenge magnifique, porteur d’un dialogue universel ?

Après cette introduction un peu longue, mais je crois que vous ne m’en tiendrez pas rigueur, revenons à littérature mongole malheureusement peu traduite en français.

 

Tsendiin Damdinsüren (1908-1986) est un auteur célèbre à plus d’un titre. Si il est l’auteur de l’hymne national, de romans La Mère aux cheveux gris et de nouvelles La Fille rejetée, il doit sa notoriété à son travail de linguiste sur la modernisation de la langue mongole et surtout à sa traduction moderne de l’Histoire secrète des Mongols, une chronique de la vie de Gengis Khan, écrite au XIIIè siècle quelques années après sa mort, la première œuvre écrite en langue mongole et considérée comme un sommet de la littérature. Cet ouvrage a été traduit par Marie-Dominique Even et Rodica Pop (Connaissance de l’Orient, collection UNESCO/ Gallimard, 1994)

Byambyn Rinchen (1905-1977), qui a lui aussi participé au travail de rénovation du mongol, parlait plusieurs langues. On lui doit la traduction de plusieurs auteurs étrangers tels que Nâzim Hikmet, Guy de Maupassant, Maxime Gorki, Vladimir Maïakovski et Mikhaïl Cholokhov.

ROMAN

GALSAN TSCHINAG (né en 1944)

Galsan Tschinag (de son vrai nom Irgit Schynykbaj-oglu Dshurukuwa) – qui descend d’une famille de chamans touva, a grandi dans l’univers aride et grandiose des steppes aux confins du désert de Gobi, dans le Haut-Altaï – est l’un des rares écrivains mongols connu à l’étranger et traduit en français. En 1962, il part étudier en Allemagne (grâce aux échanges entre pays communistes) et revient en Mongolie en 1968 où il enseigne l’allemand. Quand plus tard il se consacre à l’écriture, une manière pour lui de faire exister le peuple touva – vivant entre ciel et terre – auprès des Européens, ses romans sont publiés en allemand, traduits en anglais et en français. Son livre La caravane relate un grand rêve devenu réalité : ramener les Touvas au berceau de leurs origines, une épopée qui va durer cent cinq jours. Nous sommes en 1995, quand il décide le peuple Touva à revenir sur leurs terres. À la tête d’une Caravane de trois cents chevaux et cent trente chameaux, Galsan Tschinag reconduit les Touvas vers le district de Tsenghel, sur les sommets de l’Altaï, la terre de leurs ancêtres : les Kazakhs les en avaient chassés en 1959. Chantre des terres de Mongolie Galsan Tschinag a un vécu qui l’inspire, il sert de cadre à son univers romanesque. Auteur de plus d’une douzaine de livres, il décrit la vie de son pays où les habitants se trouvent confrontés depuis des décennies à de multiples contradictions, voulant à la fois préserver leurs traditions et accéder à la modernité. Galsan Tschinag défend la Mongolie authentique et les coutumes ancestrales de son peuple dont la vie nomade est menacée par la modernisation. À travers son œuvre l’auteur ouvre des fenêtres sur un monde inconnu et fascinant fait de paysages d’une solitude extrême mais d’une beauté à couper le souffle, de chameaux, de caravanes de nomades, de yourtes, d’ovoos (sortes de cairns de pierres sèches élevés au sommet des collines) d’emblèmes à tête de yacks…

Dojnaa

(Trad. Dominique Petit et Françoise Toraille, éd. Philippe Picquier, 2011)

Voilà un portrait fort et remarquable d’une femme, Dojnaa, fille d’un lutteur de légende, abandonnée par son mari et qui se bat pour vivre avec ses deux enfants au cœur de steppes grandioses et hostiles, où la voûte du ciel est d’un bleu cristallin : « Elle avait enfin pu montrer de qui elle était la fille (…) elle était apparue sur la monture d’Ergek, ce cheval blanc aux oreilles de loup et à la robe couleur de nuages d’orage, elle avait fait irruption dans le repaire étranger et avait étouffé dans l’oeuf la nouvelle malfaisante. » Fière et solide comme un roc Dojnaa traque le loup, défi l’hostilité des lieux. Elle ne se désarme devant aucune situation, elle supporte les commérages à propos du départ de son époux, résiste aux hommes qui tente d’abuser d’elle. Galsan Tschinag a construit son roman comme un hommage : « à la femme nomade, qui porte sur ses épaules le destin d’un monde en train de disparaître. »

La fin du chant

(Trad. Dominique Petit et Françoise Toraille, éd. L’Esprit des péninsules, 2005, éd. Philippe Picquier, 2007)

Des êtres qui luttent contre leur âpre destin, un récit beau et cruel qui fait entendre une superbe et lancinante complainte. La vie doit continuer, la lutte pour la survie aussi. Shuumur, le père, après un mariage arrangé, a épousé une femme qu’il finit par aimer, mais il s’en rend compte trop tard, il est aujourd’hui veuf. Sa maîtresse, la belle Gulundshaa, a été enlevée un jour par les Kazakhs. Un de leurs chefs abuse d’elle et elle se retrouve enceinte. Quand le père lui avoue sa fierté d’être Kazakh et son mépris pour les Touvas, elle s’enfuit avec l’enfant qui lui apparaît comme un être maléfique. Désespérée, elle rejette la progéniture de cet homme, et étrangle son enfant. Shuumur vit désormais seul dans une yourte avec ses trois enfants. Dombuk, âgée de 14 ans, assume le rôle de mère, gère le foyer et ses deux petits frères. Tandis que son père est parti chasser Dombuk tente de sauver un poulain orphelin en l’offrant à une jument qui a perdu son petit. À l’aide de chants et de prières elle croit à l’adoption, à cette réconciliation contre nature. Mais les instants sont tragiques, la jument, prostrée devant son poulain mort-né, refuse : comme les humains elle vit un deuil. Gulundshaa voudrait remplacer la femme de Shuumur, mais il n’est pas prêt et la traite durement. Elle rêve d’être aimée et ne demande qu’à apporter son affection à cette famille qui en manque tant. Un récit entre tragédie et espoir où les êtres, s’ils acceptaient l’amour qu’on leur donne, pourraient peut-être vivre et croire au bonheur.

 

NOUVELLE

DASHDORJIN NATSAGDORJ (1906-1937)

Borjigin Dashdorjiin Natsagdorj (Боржигин Дашдоржийн Нацагдорж), poète, écrivain, dramaturge issu d’une famille pauvre et noble, est né au bord du lac Gün Galuutai. L’essentiel de son instruction, faute de scolarisation, lui est donnée par un tuteur. À partir de 1911 il travaille comme écrivain dans un département de l’armée. Plus tard, grâce aux échanges entre pays communistes, il séjourne de 1926 à 1929 en Allemagne, époque où il fonde le syndicat des écrivains de Mongolie. En 1930 il s’interroge sur l’idéologie gauchiste et, arrêté en 1932, il est relâché la même année. En juin 1937 il meurt, âgé seulement de 31 ans. En 1981, le syndicat des écrivains de Mongolie fait élever, dans la réserve naturelle de Gün-Galuut, un monument à sa mémoire sur le lieu même de sa naissance.

 

Pierre noire

Les nuits d’été sont courtes et le soleil est déjà haut dans le ciel à huit heures du matin (…). Quelques mots confus dans mon Journal me sont difficiles à lire : « Samedi 30 août. Pierre noire Nina. », la signification de ces mots est déjà oubliée et obscure. Je la lis une nouvelle fois, lentement, je m’arrête au dernier mot, Nina.

Nina est le nom d’une fille que j’ai aimé autrefois, et ma mémoire s’allume comme de l’électricité pendant un instant, me ramenant aux jours où je l’étreignais et l’embrassais à l’ombre d’un orme. Excité par l’image apparaissant au bord de mes cils,  je me mets à nager dans de vieux souvenirs. Je suis de plus en plus ému par cette nage; l’image se transforme en rêves, et je m’assoupis. Réveillé par la cendre de cigarette tombant sur mon torse, je commence à penser de nouveau à la signification de ces quelques lignes. A la simple évocation de ce prénom, il me souvient de la jeune et mignonne fille dont je tombais amoureux il y a sept ans de cela,  et dont je fus séparé ensuite par des montagnes et des mers; mon cœur se serre.  Ne sachant pas où elle pourrait résider, j’essaie de la trouver mais j’échoue,  et me voici effaré par son absence (…).

La seule solution parmi les quelques mots était la date : Samedi 30 août.  Pierre noire devait être le nom d’un lieu,  et cela pouvait être un lieu de rencontre. Cet ensemble m’apparut comme la signification correcte, et je me mis à chercher la date sur un calendrier.  Nous sommes aujourd’hui le 30 août, samedi. Jaillissant hors du lit, j’ordonne à mon cuisinier de seller mon cheval (…). Je me levai promptement, empoignait mon fouet et me hissait sur le cheval. Mais je demeurais assis  à scruter les oreilles de mon cheval un long moment, ne sachant quelle direction prendre pour rallier Pierre Noire (…). Je décidai alors d’aller vers l’ouest, selon l’intuition de ma monture.

Soudain, je me rendis compte que je m’étais avancé vers un désert, où on ne trouvait pas âme qui vive à des kilomètres. J’étais assoiffé, et mon âme gémissait de solitude. Bien que le cheval suait, il n’avait pas l’air exténué. Je continuais à chevaucher des kilomètres contre le vent, surmontant des collines. J’ouvrais ma tunique et atteignis la vaste steppe ouverte, au sol marécageux parsemé de buissons de salicorne. Aux quatre directions,  je ne vis rien d’autre que des nuages sombres dans le ciel, menaçant de pluie. L’état du désert n’est pas plaisant.  Je restai un moment perdu dans mes songes, le bruissant vent d’automne m’attristait. Je me perdais dans le désert immense au lieu de retrouver Nina.

Soudain, l’oreille de mon cheval se dressa, éveillée par un bruit (…). Ce n’était ni un renard, ni un loup, mais un chien. Le chien remua la queue et nous conduisit vers l’ouest. Il me faisait l’effet d’un chien de garde ou de chasse, et je trouvais là espoir de trouver quelqu’un enfin. Nous galopâmes ainsi en suivant le chien.  Il nous éloignait de la steppe insalubre,  et le paysage se transforma en des confins montagneux couvert d’herbe bien verte, une chaîne de montagnes à l’extrême nord ouest que longeait en jasant un fleuve à ses pieds. Nous passâmes une colline. Le chien ralentit sa progression, et bientôt j’aperçus un taudis poussiéreux. Un homme en sortit et salua le chien. J’étais heureux de pouvoir me reposer (…).

L’homme semblait avoir la trentaine, et portait un pantalon de jean avec une ceinture de cuir. Il parlait un étrange dialecte. J’interrogeai ces gens à propos de « Pierre Noire : « J’ai vécu ici depuis mon enfance. Je suis un chasseur et je connais bien ces lieux. »  Mon cœur se met à battre dans ma poitrine, mais je fus déçu par les propos qu’il tint ensuite : « Je n’ai jamais entendu parler d’un tel endroit ». Je me sentis impuissant, et ne savais plus où aller. La Terre est vaste, et personne ne sait où se trouve Pierre Sombre (…). Puis une vieille femme qui était étendue à ma gauche, redressant à peine sa tête, se leva et pria devant une sorte d’icône (…). Elle retira alors quelque chose de l’icône, le donna à l’homme et dit : «  Mon fils, ceci appartenait à tes ancêtres.  Le garçon pourrait trouver l’endroit qu’il recherche s’il trouvait une pierre pareille à celle ci. » : « On dit que c’est un objet précieux rapporté d’un lieu inconnu » (…) : «  Tu deviens sénile, grand-mère.  Cet homme se perdra par ta faute », mais je me décidai à trouver l’endroit d’où cette pierre pouvait provenir. (…).

J’étais déjà dans la forêt profonde, et la pluie, que les nuages avaient contenu jusqu’à la mi-journée, se mit à tomber. Des vents puissants soufflèrent, les arbres bruissaient et le tonnerre retentit. Sous mes pieds, tout devenait de plus en plus bourbeux. Un loup hurlait quelque part. J’étais complètement déboussolé. J’oubliai le but de mon expédition et l’examen des pierres, et ne songeait plus qu’à sauver ma vie (…). La pluie redoublait, des éclairs lacérèrent le ciel, le sol devenait de plus en plus inextricable et j’avais quasiment perdu toute trace du chemin de retour.  L’endroit était rocheux et effrayant. Le nom Pierre Sombre était juste. Il est impossible que Nina puisse se trouver en des lieux si épouvantables.

Je décidais d’attendre le lever du jour. Mon cheval est effrayé par quelque chose, et hennit frénétiquement. J’en frémis jusqu’aux os. La chose qui a suscité son effroi était brièvement visible dans les ténèbres, mais a disparu. J’ai tenté de la suivre,  mais je n’ai pu la retrouver. Ma Nina a disparu, ma Nina est perdue à jamais.

(Extrait de Pierre noire, d’après l’adaptation de A. Delgermaa, traduit de l’anglais par E. Dupas)

CONTE

La cave du chien jaune de Gantuya Lhagva

Cette histoire est, comme c’est le cas le plus souvent, racontée aux enfants par des vielles femmes pendant les veillées. Une jeune fille très belle tombe malade et personne n’arrive à la guérir. Son père consulte un sorcier qui lui conseille de se débarrasser de son chien jaune. Il lui explique en vain que sa fille tient beaucoup à l’animal comme lui d’ailleurs, car il protège son troupeau. Il demande au sorcier la raison, mais celui-ci ne lui donne aucune explication et lui dit à nouveau que c’est le seul remède. Le père, ne désirant pas se séparer de son chien, décide de le cacher dans une grotte. Quotidiennement il lui apporte de la nourriture et au fil des jours la santé de sa fille s’améliore nettement jusqu’à ce qu’elle soit complètement guérie. Mais un beau matin le père constate que le chien a disparu. Le secret de la guérison de sa fille tenait en réalité à tout autre chose. Amoureuse d’un garçon, elle saisissait parfois l’instant où son père s’absentait, grâce au chien jaune qu’il allait nourrir, pour retrouver secrètement son amoureux. Très belle adaptation au cinéma sous le nom Le Chien jaune de Mongolie par Davaa Byambasuren (2006)

Contes des sages de Mongolie

Patrick Fischmann et G. Mend-Ooyo

(éd. Seuil, 2012)

Avec ces légendes extraordinaires, les enfants rêveront à ces terres lointaines et méconnues. Ils découvriront l’étonnante amitié du fils aimé du loup ou de drôles de mariages comme celui de la fille du khan qui épouse l’étoile ou le chasseur qui devient le compagnon d’une femme-cygne.

Contes d’amour autour du monde

Muriel Bloch (auteur) et Chloé Pooizat (illustratrice)

un livre-disque (éd. Didier jeunesse, 2007)

Six contes qui entraine le jeune lecteur à la découverte du sentiment amoureux (un petit chameau blanc perdu et prêt à tout pour retrouver sa mère, deux enfants qui s’aiment malgré les interdits…) sur les chemins du monde, depuis les plaines d’Afghanistan jusqu’à l’Atlas en passant par les steppes sauvages de Mongolie.

Contes et récits de Mongolie

Alain Desjacques, Tsegmidin Sûkhbaatar, Naran Touyaghin Bouyan

(éd.Nathan, 1991)

36 contes où les histoires d’animaux sont privilégiées.

POÉSIE

Dans la littérature mongole, la poésie est un genre important. À la fois orale et écrite, elle est à ce double titre difficilement accessible et de plus rarement traduite. On peut néanmoins constater les liens sensibles qui se tissent à l’occasion de rencontres croisées entre les poètes du monde. Le 26ème Congrès Mondial des poètes qui s’est déroulé à Oulan-Bator en 2006 en est un prestigieux exemple. Placé sous le signe de la commémoration du 800ème anniversaire de la création de l’empire mongol par Gengis Khan et organisé sous les auspices de l’Académie Mondiale des Arts et de la Culture, cet événement majeur a mobilisé plus de 250 poètes venus d’une cinquantaine de pays. Patrick Fischmann, poète, conteur, musicien, chanteur, qui a publié un recueil de contes avec le célèbre poète mongol Mend-Ooyo, confiait lors d’une interview à France Culture : « La langue des Mongols s’inspire du vent, de l’infini et du silence, elle exige d’elle-même trois cent mots pour décrire la robe des chevaux, décline la forme des nuages, dispose d’un terme pour chaque sorte de glace. »

DASHDORJIN NATSAGDORJ (1906-1937)

Considéré comme l’un des grands poètes mongols (voir ci-dessus), ses poèmes se rattachent à des sujets divers (patriotique, révolutionnaire, éducatifs…), mais il est aussi l’auteur de romances amoureuses. La plus célèbre d’entre elles Les Trois Tristes Collines, une romance tragique, est devenue l’un des opéras (musique de Damdinsüren et Smirnoff) les plus populaires de Mongolie, joué régulièrement à l’Opéra d’Ulaanbaatar. Son poème le plus connu Ma terre natale, célèbre la beauté et la diversité de la nature en Mongolie.

GONBOJAV MEND-OOYO (Г.Мэнд-Ооёо)

Gombojav Mend-Ooyo, né en 1952 dans une famille de bergers à Dariganga, est un grand poète contemporain de la steppe mongole qui a participé à plusieurs rencontres ou festivals de poésie en France. Auteur d’une quarantaine de recueils de poésie, d’essais et de fiction, ses écrits ont été traduits dans une quarantaine langues, dont le français. Ses poèmes sont comme : « Une ode à la terre et aux relations esthétiques et poétiques que nomades et artistes mongols entretiennent avec elle, en ces temps troublés. » (L’INALCO, à l’occasion de Terre Imprévue : poèmes, danses et chants de Mongolie). Président de l’Académie de culture et de poésie de Mongolie, Mend-Ooyo est particulièrement attaché à la protection du patrimoine artistique de son pays. En 2015 il a été décoré de l’Ordre de Chinggis Khan, la plus haute distinction culturelle de Mongolie. Gombojav Mend-Ooyo est un écrivain engagé qui milite contre l’intensification de l’exploitation minière et la défense des traditions pastorales nomades, prometteuses d’un respect de l’environnement. Parmi ses recueils de poésie traduits en français citons :

Parole nomade

Trad. Imre P. Zsoldos (éd. Jentayu, 2010)

Tous ces moments de lumière (Académie mongole de la culture et de la poésie, 2016).  Trad. Imre P. Zsoldos, Patrick Fischmann, S. Bulgantamir, T. Tumurhulug, Raphaël Blanchier, Khurelbaatar.

CHANTS

Les chants en Mongolie sont riches et variés. Le plus original et aussi le plus célèbre est ce qu’on appelle le chant « diphonique » (inscrit depuis 2010 sur la liste du Patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO). C’est une expression artistique fascinante. En effet, comment concevoir qu’une seule personne parvienne à chanter à deux voix ? Le chanteur émet un bourdon grave avec la gorge, tandis que simultanément sont produites, par amplification et résonance, des harmoniques aiguës. Cette technique vocale – développée tout particulièrement par les chanteurs de Mongolie qui l’appellent khöömii ou chant de gorge – se retrouve dans d’autres musiques, notamment dans les polyphonies de Sardaigne ou le chant des Xhosa d’Afrique du Sud. L’amour est souvent le thème central, mais on y célèbre aussi le pays natal et le cheval.

Chants d’un barde mongol de György Kara (Akademiai Kiado, Budapest 1970, trad. française en 1968 revue par Yvonne Zsak de l’Institut Français à Budapest.) Il s’agit d’un important ensemble de textes collectés en Mongolie chinoise en 1959.

Le  « Gheser » signifie le héros par excellence, et le poème ci-dessous se compose de trois thèmes chers aux Mongols, le cheval, la yourte et la bien-aimée.

Le cheval de Gheser

Il a le corps de la grandeur d’une montagne,

Il a les oreilles de la grandeur d’une ravine.

Il a les yeux de la grandeur d’un lac,

Il a un nez d’acier noir,

(C’est) la monture miraculeuse, le Sage Bai. (…)

 

La tente de Gheser

(Inondée) par la lumière de la lune et du soleil,

Elle a la forme d’un moule de petit stupa.

Dans sa contrée belle et claire

C’est une belle tente mongole sans pareille.

Elle a des treillis de pierres précieuses tressées

Et les lanières (du treillis) sont des perles fines.

Elle a des lattes de pierres précieuses qui s’allongent

C’est une tente bien dressée (…)

 

Rogmo, la femme favorite de Gheser

Pour le maître, Gheser le Brave,

Elle est comme le foie et le cœur.

Elle est la fleur pour les yeux voyants,

Elle est le musc pour son nez flairant.

Avec la blancheur de son visage

Le papier et la ouate pourraient rivaliser ?

Avec la splendeur de ses dents

La conque nouvelle pourrait rivaliser ?

Elle a des lèvres comme le meilleur des raisins

Ses joues sont rouges comme la pêche.

Ses sourcils sont pareils aux feuilles du saule.

Ses yeux ébranlent le pays.

Elle est pleine d’esprit et d’intelligence.

Elle est Rogmo, la femme délicieuse

Rogmo, la femme bien-aimée

Rogmo, la femme d’une beauté merveilleuse.

(G. Kara, Chants d’un barde mongol, p. 112 et 116-20)

CHANTS D’AMOUR

La musique vocale est beaucoup plus développée en Mongolie que la musique instrumentale. Ne transporte-t-on pas sa voix, ses « cordes vocales », partout où l’on se trouve. Aussi l’une des originalités de la Mongolie dans ce domaine ce sont leurs chants, dont la beauté et la richesse sont remarquables. Vous trouverez ci-dessous deux chants longs (urtiin duu) – La flûte limbe, une flûte traversière en bois de feuillu ou en bambou, accompagne traditionnellement ces chants – le plus souvent chantés à l’occasion des mariages, de l’inauguration d’un nouvel habitat, la naissance d’un enfant, le marquage au fer d’un poulain ou divers événements fêtés par les communautés mongoles nomades.

PRINCESSE NIRGIDMA DE TORHOUT (1908-1983)

Nirgidma de Torhout (1908-1983) est une princesse mongole, issue de la tribu nomade Toughut, dont le père descendait d’une longue lignée aristocratique Oïrats ou Oyrats vivant dans les steppes de l’Altaï. Elle passe sa jeunesse d’un camp nomade à un autre puis son père, devenu sénateur de la République de Chine, elle abandonne la vie au cœur des steppes. Elle étudie à Pékin, puis à l’université de Paris et de Bruxelles. Dans les années 1920 elle rencontre Teilhard de Chardin en Chine et en 1931 elle rencontre les membres de l’incroyable « Croisière jaune ». En 1937, restée très attachée à ses racines, elle publie avec Mady Humbert-Sauvageot Dix-huit chants et poèmes mongol (éd. Librairie Paul Geuthner) et deux ans plus tard elle épouse un diplomate français. Voici deux chants extraits de son recueil, ils expriment la douleur d’un amour perdu et la joie d’un amour naissant.

Avez-vous vu ? (p. 13)

Il monte un cheval couleur de feu,

Son corps d’homme est jeune et beau.

Passant qui suivez les chemins herbeux,

Avez-vous vu  mon bel amant ?

Sa taille est fine, ceinte de soie noire

Son front, celui d’un roi glorieux

Passant, qui revenez des mers lointaines

Avez-vous vu mon bel amant ?

A qui me parlera de lui,

Je donnerai mon bracelet d’or.

A qui me montrera ses traces,

Les perles rondes de mes oreilles.

Mais ni dans les herbes, ni sur les eaux

Sous le soleil il n’est plus.

Par quel chemin inconnu

Aller rejoindre mon bel amant ?

 

Le doux tendre (le vent)

Au doux et tendre vent

Se balancent les arbres des monts.

Avec son ami pareil à un axe de tendresse

Plus cela dure et plus on s’accoutume.

Sur mon aubère aux oreilles en pointe

Je franchirai le Gobi du pays Khalkha

Avec toi mon cher amour.

Plus l’on vivra ensemble et plus l’on s’accoutumera.

Sur mon aubère à la crinière dédoublée

Je franchirai le Gobi de Charga

Et toi, petite délurée

Une fois par mois je te rencontrerai (…)

Dans les denses forêts bleutées

Le coucou coucoulera

Avec toi, ravissant amour,

En un continuel épanouissement je m’accorderai.

Dans les blancs nuages effilochés

La fraîche transparence migrera

Avec toi, amour de mon cœur

Vivant à l’abri je serai heureux.

Poèmes à lire dans Etudes mongoles de Roberte Hamayon et M. Helffer (4, 1973, p. 171-172) « A propos de musique populaire mongole »

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