الحب

Algérie

Djibouti

Egypte

Libye

Maroc

Mauritanie

Somalie

Soudan

Tchad

Tunisie

* "amour" en Arabe

Quelques précisions sur cette langue

L’arabe est une langue sémitique aujourd’hui parlée en première ou seconde langue par plus de 422 millions de personnes au sein du monde arabe et de la diaspora arabe.
La langue arabe est originaire de la péninsule Arabique, où elle devint au VIIe siècle la langue du Coran et la langue liturgique de l’islam. La colonisation territoriale de l’Empire arabe au Moyen Âge et l’islam en ont largement répandu l’usage au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Europe (péninsule Ibérique, Sicile, Crète, Chypre, territoires d’où elle a disparu, et Malte, où le maltais en constitue un prolongement particulier). Parlée d’abord par les Arabes, cette langue qui se déploie géographiquement sur plusieurs continents s’étend sociologiquement à des peuples non arabes, et est devenue aujourd’hui l’une des langues les plus parlées dans le monde. C’est la langue officielle de plus de vingt pays et de plusieurs organismes internationaux, dont l’une des six langues officielles de l’Organisation des Nations unies.
La langue arabe est marquée par une importante diglossie entre l’arabe littéral, langue véhiculaire surtout écrite, et l’arabe dialectal, langue vernaculaire surtout orale. L’arabe littéral comprend l’arabe classique (pré-coranique, coranique, et post-coranique) et l’arabe standard moderne. L’arabe dialectal comprend de nombreuses variétés régionales, pas toutes intelligibles entre elles.
Les vecteurs du rayonnement culturel de la langue arabe sont l’islam, la littérature de langue arabe et les médias audiovisuels contemporains dont la télévision et Internet. Un vecteur historique important de rayonnement fut l’emprunt lexical de nombreux termes arabes dans des langues étrangères, entre autres les langues romanes dont le français.

Quelques références littéraires et cinématographiques

LITTÉRATURE

L’amour fou, aveugle et passionné, est intimement lié – enlacé pourrait – on dire dans bien des cas – à la mort, comme le montre tant d’exemples d’amours célèbres de l’histoire universelle. « Celui qui n‘est pas mort de son amour n’a pas vécu par lui » dit Ibn al-Fârid, un poète égyptien du XIIIè siècle. Les arabes n’ont pas échappé à cette réalité commune, comme on peut le voir dès l’aube de leur littérature, à travers les légendes, les récits et la poésie.

LÉGENDE ARABE

Leylâ et Majnûm ou l’Amour mystique

Sous le nom de Majnûm, qui signifie en arabe le Fou ou le Fou de Leylâ, existe l’une des histoires les plus célèbres de la littérature arabe. Cette légende, chantée sous la forme de poèmes, remonte au VIè siècle. Née dans le désert d’Arabie, elle se transmet dans tout l’Orient et au-delà, on la retrouve de la Perse à l’ensemble du monde arabe et dans la poésie bédouine.

L’histoire est celle d’un jeune homme, Qays ibn al-Mulawawah, de la tribu des Banû ’ Amir, qui tombe éperdument amoureux de sa cousine Leylâ. Leur amour semble né sous de bonnes auspices, les familles s’entendent et le mariage peut être célèbré. Mais Qays est poète, alors il clame son amour à qui veut l’entendre. Grave erreur de conduite, car en louant son amour et la beauté de sa Bien-Aimée, il enfreint la tradition. Tout s’enchaîne : le père de Leylâ s’oppose au mariage et oblige sa fille à en épouser un autre. Qays, désespéré, sombre dans la folie, s’enfuit dans le désert et commence pour lui une longue errance. Leylâ, veuve, le rejoint, mais elle meurt peu de temps après. Inconsolable et épuisé, Qays ne tarde pas à la rejoindre. Seule la mort aura réuni ces Tristan et Iseult du désert que de cruelles traditions ont séparés.

Qays a-t-il vraiment existé ou est-il un personnage inventé ? Nul ne sait? Les auteurs de cette histoire auraient divers noms d’une tribu à l’autre. Cet amour chanté, sous la forme d’un long poème, traduit toutes les variations des sentiments : le désir, l’enchantement, la conquête, les prémices de la passion, la trahison, la séparation, la solitude, l’abstinence… bref, toutes les péripéties d’une relation amoureuse.

Toi l’oiseau du matin, va, vole et porte-lui

Mon bonjour, laisse moi espérer quand j’appelle !

Apporte-lui ces mots, Dieu te guide vers elle !

Si tu reviens sur terre, alors, que ce pays

Soit là-bas, vers, Laylâ, désert où l’on s’égare,

Mais qui tient tout mon être et mon coeur en ses liens.

Ah ! Je rêve d’un jour où rien ne nous sépare,

De lui je me nourris, c’est mon dernier soutien.

Majnûn, l’Amour poème, traduit par André Miquel (éd. Actes Sud)

 

ÉGYPTE

L’Egypte, où je suis allée plus d’une quarantaine de fois entre 1980 et 1990, est l’un des pays qui m’a le plus fasciné au monde. Bien sûr, la découverte des pyramides, des temples de Karnak, de Philae, d’Abou Simbel et de l’étonnante Vallée des Rois, témoins de la grandeur de l’antiquité égyptienne, sont des sites qui m’ont profondément marqué. Mais ce qui m’a peut-être le plus interpellé à chacun de mes voyages, c’est la magie de naviguer sur le Nil. Depuis des millénaires, à bien des endroits, les rives de ce fleuve majestueux n’ont guère changé depuis l’époque des pharaons. Alors vous pensez bien que me dire, que je contemplais les mêmes paysages que Ramsès, Sésostris, Néfertiti ou Hatchepsout, me donnait des frissons. Enfin, je ne résiste pas à vous dire quelque mots d’Assouan, où l’on peut voir l’un des plus beaux paysages du monde depuis la célèbre terrasse de l’hôtel « Old Cataract », un balcon sur le Nil, où glisse les felouques aux voiles blanches, avec en toile de fond les espaces infinis du désert, un décor grandiose qui a inspiré poètes, artistes, cinéastes… Un lieu où j’ai toujours rêvé de poser mes valises avec un amoureux ou sinon d’y séjourner pour écrire et peindre à l’aquarelle.

Assouan est aussi un lieu célèbre où bien des idylles romantiques ont vu le jour… La langue arabe, d’après les spécialistes, dispose de pas moins de soixante mots pour désigner l’état amoureux.

La condition féminine, le poids des traditions ancestrales et le rôle de la femme en Egypte, comme dans la société maghrébine, ont été le fer de lance de nombreux cinéastes. Mes choix de films reflètent le parti pris volontaire de certains d’entre eux d’évoquer la relation homme/femme à travers de belles histoires d’amour, mais aussi pour dénoncer des traditions, aliénantes et humiliantes pour les femmes, ou des tabous, comme le mariage mixte, encore très présents aujourd’hui. J’ai choisi aussi de laisser le plus souvent la parole aux cinéastes qui apportent un éclairage intéressant et sensible sur leurs films.

CINÉMA

SALAMA

TOGO MIZHRAHI (1945, noir et blanc)

Une chanteuse esclave s’évade par amour.

 

TAXI AL-GHARAM (TAXI DE L’AMOUR)

NIAZI MOUSTAFA (1953, noir et blanc)

Abdel Aziz Mahmoud (Abdo), Hoda Soltan (Elham), Zeinat Sedki (Zewakab).

Une jeune femme, riche héritière, s’enfuit de chez son oncle qui veut la marier, contre son gré, à un homme qu’elle n’aime pas. Un chauffeur de taxi la recueille, l’héberge et pour la protéger il la fait passer pour sa femme.

 

BAHR AL-GHARAM (UN OCÉAN D’AMOUR)

HUSSEIN FAWZI (1955, noir et blanc)

Rouchdi Abaza, Abdelsalam al-Naboulsi, Youssef Wahbi.

Tounah et Amin s’aiment et vont bientôt se marier. Achour, un riche propriétaire d’un chantier naval, a une femme frivole qui tente en vain de séduire Amin. L’été arrive, un metteur en scène vient passer ses vacances dans le village et très vite il est attiré par Tounah. À l’occasion d’une partie de pêche, le père de Tounah se noie et Amin tombe. Les frais d’hôpital sont très élevés, Tounah explique sa situation au metteur en scène et lui demande de l’embaucher pour l’aider. Elle devient célèbre et sa réussite provoque la jalousie de la femme d’Achour.

 

ENTA HABIBI (C’EST TOI MON AMOUR)

YOUSSEF CHAHINE (1957, noir et blanc)

Farid el-Atrache, Chadia, Hind Rostom, Serag Mounir.

Farid et Yasmina se détestent mais, sans le savoir, leur destin est lié et un dénouement heureux leur permettra de découvrir qu’ils sont fait l’un pour l’autre. Pour l’heure, au début du film, ils se retrouvent dans une situation embarrassante. Ils sont cousins et pour hériter, chacun de la fortune d’un parent, ils doivent, selon les clauses de l’héritage, se marier. Mais ils ont chacun une liaison, Farid avec Nana, une danseuse endiablée, Yasmine avec Sensen, un riche propriétaire de champ pétrolifère. La troisième tentative de mariage échoue à nouveau, l’un et l’autre simulant une crise d’appendicite. Finalement, ne voulant tout de même pas que cette fortune leur échappe, ils finissent par accepter de se marier. Ils jouent le jeu jusqu’au bout et partent en voyage de noces à Assouan, le lieu favori des Egyptiens en lune de miel. Mais Sensen et Nana jaloux les suivent de près… Après toutes ces tracasseries, ces hésitations et ces quiproquos, ils découvrent qu’ils sont bien ensemble et ne veulent plus se quitter.

 

BAB EL HADID (GARE CENTRALE)

YOUSSEF CHAHINE (1958, noir et blanc)

Youssef Chahine (Kenaoui), Hind Rostom (Hanouna) Farid Chawki (Abou Serib).

Kenaoui, infirme, a pris ses quartiers à la gare centrale du Caire où il vend des journaux pour gagner sa vie. Il aime regarder les filles, mais celles-ci sont indifférentes. Personne ne fait attention à lui, alors que lui regarde tout le monde, observe le va et vient incessant de personnes anonymes qui se croisent et bourdonnent autour de lui. L’une des filles de la gare a sa préférence, c’est Hanouna, la petite vendeuse de soda. Mais elle aussi, n’a que faire de ses avances, elle est attirée par un bagagiste, leader syndical, auquel elle lance volontiers des œillades. Kenaoui, jaloux, ne supporte plus l’indifférence persistante de sa bien-aimée… Youssef Chahine, qui interprète le rôle principal, a volontairement grossi le trait de son personnage et des miséreux qui hantent le microcosme d’une gare. Le film, présentant une image misérable du Caire et de sa population marginale, a été interdit pendant douze ans en Egypte. Ce mélodrame social lui a apporté la notoriété.

 

AHIBBAK YA HASSAN (JE T’AIME HASSAN)

HUSSEIN FAWZI (1958)

Naïma Akef, Chukry Sarhan, Stephan Rosti, Choukri Serhane.

Un riche jeune homme fait partie d’un orchestre et la femme qu’il aime s‘est enfuit de chez elle et a trouvé refuge chez son oncle musicien. Auprès de lui, elle découvre qu’elle a des dons pour la musique, ce qui ne peut que la rapprocher de son amoureux. Mais le père de ce dernier a déjà décidé de l’avenir de son fils. Il souhaiterait qu’il lui succède dans son usine et qu’il épouse une de ses cousines. Tiraillé entre ses aspirations artistiques, sa bien aimée et les vœux de son père, que va-t-il décider ?

 

CHABÂB IMRA’AH (LA SANGSUE)

SALAH ABOU SEIF (1959)

Taheya Carioca, Choukri Sarhane, Chadia, Abdel Warith Assir.

Un jeune homme de la campagne se rend au Caire pour étudier. Il loge chez une femme d’un certain âge qui ne tarde pas à tout faire pour le séduire. Troublé par sa sensualité, il accepte d’entretenir avec elle une liaison jusqu’au jour où il rencontre une autre femme. Arrivera-t-il à se dégager de l’emprise de l’intrigante pour vivre ce nouvel amour ?

 

SIRRA FIL NIL (TEMPÊTE SUR LE NIL)

ATEF SALEM (1959, noir et blanc)

Hind Rostom (elle-même), Rushdy Abaza (Mujahed), Omar Sharif (Muhasad), Ahmed El Haddad.

Muhasad, qui habite en Haute-Egypte, est chargé d’une mission par son père, aveugle : remonter le Nil jusqu’au Caire à bord de la felouque « la Fiancée du Nil », la vendre et avec la somme d’argent, complétée par la participation des villageois, acheter une barque à moteur. Il entreprend ce voyage accompagné de quatre hommes d’équipage et de Mujahed, un vieil ami de son père, pilote du bateau et responsable de l’argent de la transaction. La « Fiancée du Nil » lève l’ancre et glisse sur le fleuve qui, filmé en noir et blanc, est d’une beauté à couper le souffle.

Personne à bord ne s’aperçoit que le bateau est suivi par Abu Safan, un voyou, et ses complices bien décidés à tout tenter pour récupérer le butin. Leur idée, faire monter à bord la danseuse Hind Rostom pour séduire Muhasad et récupérer l’argent. Elle réussit à monter à la première escale, mais Mujahed la surveille et elle n’arrive pas à son but, alors elle tente de le séduire. S’en suit une bagarre, fatale pour la belle danseuse… Youssef Chahine a offert au jeune Omar Sharif ses premiers rôles qui vont contribuer à lancer sa carrière exceptionnelle et faire de lui, le plus célèbre des acteurs égyptiens.

 

BEIN EDEIK (ENTRE TES MAINS)

YOUSSEF CHAHINE (1960)

Magda, Choukri Sarhane, Zeynat Sedki, Kismet Cherine.

Une jeune fille, dont l’oncle veut la coucher sur son testament comme héritière, est sommée par celui-ci de se trouver au plus vite un mari.

 

NAHR EL HOB (LE FLEUVE AMOUR)

EZZEDINE ZULFIQAR (1960)

Adapté d’Anna Karénine de Léon Tolstoï – Faten Hamana (Nawal), Omar Sharif.

Nawal se marie avec Taher Pacha, un homme beaucoup plus âgé qu’elle, d’un tempérament stricte et très attaché aux traditions. Quand elle met au monde un fils, qui représente le sexe fort dans la tradition arabe, cette naissance comble le père. Rappelons que ce dernier peut aller jusqu’à répudier sa femme si elle n’arrive pas à avoir un garçon. Nawal a donc remplie son devoir d’épouse et son mari, qui ne pense plus qu’à développer ses affaires, ne lui donne plus aucun témoignage d’affection, de tendresse…

Nawal souffre en silence jusqu’au jour où elle rencontre l’amour… Son mari l’apprend, pas question pour lui, selon la tradition, de divorcer et il va durcir son emprise sur sa femme. Nawal acceptera-t-elle l’attitude tyrannique de son mari ou suivra-t-elle son cœur ? Faten Hamana, icône du cinéma arabe, et Omar Sharif réunis dans ce film, ont vécu une histoire d’amour passionnelle, se sont mariés et ont formé l’un des couples mythiques de l’histoire du cinéma.

 

LELE ZOGA EL TANIA (LA SECONDE ÉPOUSE)

SALAH ABOU SEIF (1967)

Soad Hosny (Fatima), Shukry Sahran (Abul Elan, le mari), Sanaa Gamil (Hafiza, la première épouse), Salaa Mansour (le maire).

Le vieux maire du village, marié et sans enfant, à l’idée de mettre en place un stratagème diabolique pour avoir une seconde épouse. Il jette son dévolu sur une jeune femme mariée à un paysan pauvre. Il fait accuser de vol son mari, le fait arrêter par la police et annonce qu’il arrêtera les poursuites si sa femme divorce. Difficile pour le couple de refuser ce chantage. Fatima divorce et épouse le maire. Mais elle veut se venger et cherche comment échapper à son devoir conjugal.

Elle va utiliser la jalousie de sa première femme qui, à chaque fois qu’il tente de consommer son mariage, en est empêché par un incident. Elle continue à voir son mari, tombe enceinte et le maire comprend qu’il a été berné. Il tombe malade, meurt et Fatima peut retrouver celui qu’elle aime. Un portrait peu flatteur de l’homme qui, suivant une tradition arabe ancestrale, abuse sans vergogne d’un pouvoir et d’une tyrannie sur les plus faibles.

 

IMRA’AH SAYIAB AL-SAMAH (UNE FEMME DE MAUVAISE RÉPUTATION)

HENRI BARAKAT (1973)

Chams al Baroudi (Hana), Mahmoud Yassin (le mari), Youssef Imad Hamdi (le patron), Youssef Shaaban (l’amant).

Kamal, cadre dans une entreprise importante, et sa femme Hana vivent au cœur de la bourgeoisie cairote avec leur fils de 10 ans. Quand Kamal commence à avoir des difficultés financières il imagine une solution, sans le moindre scrupule, pour obtenir une promotion. Si sa femme accepte de devenir la maîtresse de son patron, sa position privilégiée pourrait le faire accéder à ce poste. Elle accepte et bientôt ils forment un trio, sortent ensemble et le couple profite de la générosité du patron…

Mais les choses se compliquent quand Hana rencontre Ahmed, son premier amour. De nouveau amants, Hana se retrouve dans un imbroglio sentimental difficile à démêler. Elle veut quitter son mari et son patron pour vivre ce nouvel amour, mais le destin en décidera autrement : son petit garçon tombe gravement malade et elle se tourne à nouveau vers le patron de son mari pour trouver de l’argent…   L’immoralité de ce mélodrame, présentant une femme qui commet deux adultères, a fait scandale à l’époque en Egypte.

 

OURIDOU HALLAN (JE DEMANDE UNE SOLUTION)

SAID MARZOUK (1975)

Faten Hamana (Dorria).

Dorria est malheureuse dans sa vie conjugale qui ne lui procure aucun épanouissement. Après vingt ans de mariage et le départ de son fils pour faire des études, elle demande le divorce. Commence alors pour elle un véritable parcours du combattant… Ce film met en lumière un sujet délicat, le divorce en Egypte. La tradition autorisait un homme à répudier sa femme et à demander le divorce par une simple déclaration. En revanche pour une femme il était très difficile d’obtenir le divorce. Ce film a fait bouger les choses en dénonçant les inégalités sociales et il est à l’origine d’une modification du « statut personnel » des femmes en Egypte.

 

CONCERT DANS LA RUELLE DU BONHEUR

ASMA EL BAKRI (1998)

Seif Abdel-Rahmane, Salah Elsaedani, Naglaa Fathy.

Azouz travaille à l’Opéra, un lieu fastueux, comme simple fonctionnaire, mais malgré son emploi dans cette institution de prestige il est toujours célibataire, malgré lui. Un jour, il remarque une jolie violoniste venue d’Occident et le destin semble vouloir lui sourire. Il tombe amoureux fou et se passionne pour la musique classique. Mais l’amour sera-t-il possible entre eux, la différence de culture jouera t-elle en leur faveur ?

 

AL-ACHIQAN (LES AMOUREUX)

NOUR EL CHERIF (2000)

Nour El Sherif, Abdel Moneim Madbouly, Ezza Abou.

Deux avocats tombent amoureux. La fille de l’avocat découvre que son père entretient une liaison avec sa collègue. Réalisant le malaise qu’elle a créé, cette dernière décide de rompre avec son amant dans l’intérêt de sa fille. Un drame sensible sur un couple qui se désagrège. Grand acteur égyptien et homme de théâtre, Nour El Chérif passe à la réalisation avec ce premier et unique film dans lequel il interprète le rôle principal. Sa propre vie sentimentale a été pleine de rebondissement. Après s’être douloureusement séparé de sa femme, la célèbre actrice égyptienne « Poussi » en 2006, il l’a ré-épousé en 2014, pour vivre un bonheur éphémère, l’acteur ayant tiré sa révérence en 2015.

 

SILENCE… ON TOURNE

YOUSSEF CHAHINE (2001)

Latifa (Malak), Ahmed Bedir (Alphi), Ahmed Wafik (Lamei), Magda Al Khattib (la grand-mère), Ahmed Mehrez (Abbas), Mostapha Chaaban (Nasser)

Malak, célèbre chanteuse et actrice, remporte un vif succès à la première de son nouveau spectacle. Le soir même Abbas, son mari, lui annonce qu’il veut divorcer et se remarier avec Dina, sa maîtresse. Elle et sa fille Paula acceptent, résignées. Paula, qui est sur le point de se marier, voyant sa mère atteinte d’un blues après sa séparation, l’incite à refaire sa vie avec l’un de ses nombreux prétendants. Elle s’entiche de Lamei, un gigolo arriviste, très épris d’elle. Mais cet intrus, pour sa mère, son scénariste et son metteur en scène, ne peut que créer la confusion dans sa vie, contribuer à dilapider sa fortune et freiner sa carrière. Le sachant d’un tempérament vil, ils s’arrangent pour lui faire croire que Paula va hériter de la fortune familiale. Il s’empresse de la courtiser…

 

ALEXANDRIE… NEW YORK

YOUSSEF CHAHINE (2003)

Ahmed Yehia (Yehia jeune), Mahmoud Hemida (Yehia âgé), Yousra El Lozy (Ginger jeune), Youssra (Ginger âgée), Lebleba (Jeannie), Hala Sedki (Bonnie).

Yehia, un réalisateur égyptien célèbre, se rend à New York à l’occasion d’un hommage qui lui est rendu, un voyage qui le conduit sur les traces de son passé. En effet, quarante ans plus tôt, son grand rêve américain se réalisait, il entrait dans la prestigieuse École d’art dramatique de Californie. Il y rencontrait Ginger, son amour de jeunesse, et avant de se quitter ils s’étaient jurés un amour éternel. Il se retrouve quarante plus tard à New York. L’Amérique a changé, eux aussi. Un trouble cependant les traverse à l’évocation des souvenirs de leurs premiers émois, cette parenthèse de leur vie défile à travers leurs retrouvailles. Tout semble cependant les séparer. Pas vraiment, car Yehia apprend qu’il a un fils… américain

 

EHKHY YA SCHÉHÉRAZADE (FEMMES DU CAIRE)

YOUSRY NASRALLAH (2009)

Mona Zaki (Hebba), Mona Zakki, Mahmoud Hemida (Aham), Hassan El Raddad (Karim), Sawsan Badr (Amany).

Karim et Hebba, un couple de journalistes, mènent une brillante carrière au Caire. Elle, assure une émission politique sur une chaîne de télévision privée, lui vient d’être nommé rédacteur en chef de son journal. Dans le cadre de cette nouvelle fonction, sa rédaction lui demande que sa femme change son émission en un magazine de société. Elle met en place un talk-show qui passionne les cairotes, où elle donne la parole aux femmes. Elle recueille de nombreux témoignages touchants – des histoires se rattachant aussi bien à la vie des bas-fonds du Caire qu’à celle de la jet-set, le plus souvent des femmes victimes du machisme, de la misogynie ambiante et de la violence conjugale.

Ce film ose aborder le délicat sujet de l’avortement, toujours interdit en Egypte et, je le sais pour avoir fait de nombreux voyages dans ce pays, que des milliers de femmes y ont recours clandestinement. Ces avortements artisanaux, provoqués par des méthodes dangereuses, sont responsables d’une importante mortalité chez les femmes. Selon l’OMS, cela représente 13% de la mortalité maternelle.

 

CAIRO EXIT

HESHAM ISSAWI (2010)

Mohamed Ramadan (Tarek), Maryhan (Amal), Ahmed Bider (Nagib), Sana Mouziane (Rania), Saffa Galal

Amal, de religion copte, vit dans un quartier pauvre du Caire. Elle est amoureuse de Tarek, de confession musulmane. Ils s’aiment et voudraient se marier, mais la loi le leur interdit. Pas de mariage mixte chrétien et musulman. Quand elle découvre qu’elle est enceinte, elle se retrouve confrontée à une situation et à un choix terribles. Partir clandestinement pour l’Italie avec Tarek qui lui propose de le suivre, sinon d’avorter ; perdre celui qu’elle aime si elle décide de rester ; garder son enfant et être rejeter par sa famille ; se faire avorter clandestinement, une pratique aussi frappée d’interdit. L’amour l’emportera et ils décident de tenter de braver les interdits pour rester ensemble.

 

DEFENSE D’AIMER

MAY EL HOSSAMY (2013, court métrage)

Ce court métrage interpelle. La jeune réalisatrice May El Hossamy pose la question suivante : « En tant que musulmane ai-je le droit d’épouser un chrétien ? » et elle interroge trois personnes : Sa mère, embarrassée à l’idée que sa fille se marginalise dans un amour impossible, un sage, qui ne lui donne pas de réponse et s’en remet à Dieu, et un imam, dont l’attitude affiche clairement sa misogynie, lui cite un verset du coran disant que les hommes ont autorité sur les femmes. Ce court-métrage dénonce l’injustice profonde de la société égyptienne qui interdit de s’aimer quand on est de confession différente.

 

LITTÉRATURE

ROMAN

 

L’amante du pharaon

NAGUIB MAHFOUZ (1943)

(éd. Points 2007)

Publié en 1943, ce roman ne sera traduit en français qu’en 2006. Dans un style fleuri, Naguib Mahfouz (1911-2006, prix Nobel de littérature en 1988), vous entraîne sur les bords du Nil pour vous conter une histoire d’amour aussi belle que tragique. Elle se déroule sur fonds d’intrigues politiques dans l’Egypte antique de la VIè dynastie. Le jeune pharaon Merenre II, tout juste couronné, s’éprend de Rhodopis, une courtisane à la beauté sans égale, mais au cœur de marbre, restée jusqu’à présent insensible aux nombreux prétendants qui se présentent tous les jours dans son palais blanc. Le roi partage avec elle une passion dévorante qui le détourne des affaires de l’État et de ses pouvoirs. Il découvre l’amour, mais la violence de la passion lui fait oublier son peuple. Cette situation fragilise l’équilibre politique et offusque les grands prêtres, déjà choqués par les attentions de Merenre de confisquer les biens du clergé. Mais ce dernier va battre pour défendre ses richesses. Pendant la fête du Nil, où sont réunis les gouverneurs et prêtres, la tension est à son comble…

 

La Trilogie du Caire

NAGUIB MAHFOUZ

(1957, éd. Gallimard)

Cette œuvre remarquable, de l’un des plus grands auteurs de la littérature arabe contemporaine, a trois volets : Impasse des deux palais, le Palais des désirs, le jardin du passé. Chaque roman se déroule au Caire, dans les quartiers, les rues, les impasses où a vécu l’écrivain. Le lecteur est entraîné dans une saga familiale en suivant trois générations et un personnage principal, le patriarche, un commerçant nanti et respecté dans son quartier mais qui, dans sa vie privée, est un mari et un père tyrannique. Cette saga présente, à la manière de Balzac ou Zola, tous les aspects de la vie sociale égyptienne de l’époque : le mariage, la répudiation, les règles de savoir vivre, la tenue de la maison, la place et la condition des femmes (le plus souvent cantonnées dans leur foyer), la religion, les soubresauts de l’histoire politique, les réformes, la lutte pour l’Indépendance contre les Anglais, la naissance des Frères musulmans etc. Mais cette fresque a un fil conducteur : l’amour. Un sentiment très développé par l’auteur qui évoque chez ses personnages, la délicatesse des prémices de l’amour, les sentiments, le désir, l’état amoureux, à travers de grandes envolées lyriques et toutes générations confondues :

L’alcool est l’essence de l’amour une fois dévêtu de ses oripeaux de douleur. Alors aime, tu connaîtras l’ivresse ! Enivre toi, tu connaîtras l’amour ! (La Trilogie du Caire, l’Impasse des deux palais) « Aimez les femmes et la boisson n’a rien de misérable ! (…) Ne crois pas ce qu’on dit dans les romans ! L’amour est le sentiment de quelques jours, au mieux quelques semaines. Oui, mais pourtant le véritable amour existe ! (La Trilogie du Caire, le Palais des désirs)

Dans la paix du matin naissant où l’aube retient sa traîne aux premiers rais de lumière, montèrent de la cour et du fournil les coups sourds du pétrin, aussi rythmés que la frappe d’un tambour. Amina était debout depuis près d’une demi-heure. Elle avait fait ses ablutions, sa prière, et était descendue au four pour réveiller Oum Hanafi, une femme d’une quarantaine d’années, entrée toute jeune au service de cette maison qu’elle avait quittée que le temps d’un mariage, suivi d’une répudiation qui l’y avait ramenée (…) Amina était ici la mère et l’épouse, la muse et l’artiste dont l’entourage attendait l’œuvre les yeux fermés. A telle enseigne qu’elle ne gagnait les éloges de son époux, quand il daignait lui en faire, que par le truchement d’un plat élaboré de main de maître et savamment dosé à la cuisson. » (La Trilogie du Caire)

L’alcool est l’essence de l’amour une fois dévêtu de ses oripeaux de douleur. Alors aime, tu connaîtras l’ivresse ! Enivre toi, tu connaîtras l’amour ! (La Trilogie du Caire, l’Impasse des deux palais)

«  Aimez les femmes et la boisson n’a rien de misérable ! (…) Ne crois pas ce qu’on dit dans les romans ! L’amour est le sentiment de quelques jours, au mieux quelques semaines. Oui, mais pourtant le véritable amour existe ! (La Trilogie du Caire, le Palais des désirs)

 

Avec Toi, un extraordinaire amour entre la France et l’Egypte

SUZANNE TAHA HUSSEIN

(éd. Du Cerf, 2011 collection, l’histoire à vif)

N’hésitez pas à lire cet ouvrage qui m’a particulièrement émue, elle relate la réelle histoire d’un couple entre Paris et le Caire, grandit, enrichit et porté par l’amour.

Elle, Suzanne Bresseau (1895-1989), une jeune bourguignonne chrétienne, Lui, Tahar Hussein (1915-1973), musulman, devenu l’un des hommes de lettres arabes les plus éminents du XXè siècle. Aveugle, dès l’âge de trois ans, des suites d’une conjonctivite mal soigné, Tahar Hussein déjoue son destin d’exclu grâce à une force et à une soif de savoir qui lui permettent d’accéder aux plus hauts titres universitaires. Titulaire d’un doctorat d’al-Azhar et d’un autre à la Sorbonne, il est recteur de l’université d’Alexandrie (crée par lui en 1942), nommé ministre de l’éducation, honoré par les Nations-unies, du prix des droits de l’homme peu avant sa mort. Un parcours hors du commun. Mais Tahar Hussein est avant tout un écrivain, il dictait ses textes à sa fille, à sa femme Suzanne.

À travers ce livre elle raconte le chemin de leur vie. Tout commence en 1917, quand elle annonce à ses parents (elle a 22 ans) qu’elle va épouser un jeune étudiant, venu en France grâce à une bourse et à qui elle fait la lecture. Sa famille la traite de folle : « Un étranger, un aveugle, et pour finir un musulman ». Mais, comme on le sait, le cœur a ses raisons et elle sait qu’elle doit suivre cet homme qu’elle admire, qu’elle aime et persister dans cette folie. Au fil des pages elle nous livre son parcours aux côtés de son mari, soixante ans de vie commune, d’interrogations, de combat politique et intellectuel, de rencontres exceptionnelles avec de grands écrivains français (Gide, Cocteau, Sartre…) mais aussi Tagore, Senghor… Une histoire qui dépasse celle de la cécité, une leçon de vie guidée par une valeur essentielle : l’amour.

 

Du a’ al-karawân (l’appel du courlis)

TAHA HUSSEIN (1934)

Voici cinq romans, œuvres de jeunesse, où l’auteur relate à chaque fois une histoire d’amour, belle ou tragique.

Ce roman montre le combat et la vengeance d’Amina, dont la sœur a été déshonorée par un homme qui indirectement a entraîné sa mort.

Adîb (Un lettré)

TAHA HUSSEIN (1935)

C’est l’histoire d’un jeune garçon qui à soif de connaissance, des choses de l’esprit et qui veut partir étudier à l’étranger. Il est prêt à tout sacrifier – y compris sa femme fidèle – pour suivre cet idéal. Mais il sombre dans la folie.

 

Al-Hubb al-dâ (L’amour perdu)

TAHA HUSSEIN (1942)

L’histoire se déroule en France et les protagonistes sont français. Une jeune fille sombre dans le désespoir quand elle découvre que son mari est infidèle….avec sa meilleure amie.

 

Alhâm Shahrazâd (Les rêves de Shéhérazade)

TAHA HUSSEIN (1943)

Comme beaucoup d’écrivains Taha Hussein a été tenté de prolonger une des histoires des Mille et Une Nuits. Les rêves de Shéhérazade se situent ici dans un contexte plus moderne, avec notamment le droit à la liberté des personnages et le droit pour les princes d’agir selon la justice qui a cours.

 

Shajarat al-bu’s (L’arbre de la misère)

TAHA HUSSEIN (1944)

On suit l’histoire d’une famille qui, sur trois générations subit, au fil des décennies, une série de malheurs, dont l’origine remonte à un mariage raté dès les premières heures.

 

POÉSIE

Dans l’ancienne Égypte c’est à partir du Nouvel empire qu’apparaissent les chants d’amour. Cette époque se caractérise par une vie luxueuse, assez individualiste et donc plus propice à la naissance de la poésie amoureuse. Le plus ancien témoignage conservé. à ce jour serait le « papyrus Harris 500 » On y trouve des descriptions du corps de l’aimée, des plaintes devant la porte de l’amante, des lamentations à l’aurore, au moment de la séparation, l’indifférence de l’autre, le mal d’amour, le désespoir, la solitude de la rupture…

Voilà sept jours que je n’ai vu la bien-aimée.

La langueur s’est abattue sur moi.

Mon cœur devient lourd.

J’ai oublié jusqu’à ma vie.

La bouche de ma sùur est un bouton de lotus,

Ses seins sont des pommes d’amour,

Ses bras sont des étaux,

Son front est le cerceau de l’acacia,

Et moi je suis l’oie sauvage.

Mes regards montent vers sa chevelure

Et je suis pris dans le piège

Extrait du Papyrus Harris 500, traduction de claire Lalouette

 

La nature célébrée devient complice de l’amour :

Je suis le plus bel arbre du jardin,

Et, en tous les temps, je demeure,

La bien aimée et son frère

Se promènent sous mes branches,

Ivres de vins et de liqueurs,

Imprégnés d’huile et d’essences odorantes.

Extrait du Papyrus de Turin, traduction de claire Lalouette

 

CHANSON

Oum KALTHOUM (1898-1975)

Elle est à l’affiche de l’Olympia en 1966 pour un récital. Un concert mythique de « l’Astre d’orient », la foule est électrisée par sa voix sacrée… Rappelons le destin incroyable de cette petite fille qui commence à chanter pour la première fois en public à l’âge de 6 ans, déguisée en garçon, puis dans la petite troupe de chants religieux de son père, Imam, à l’âge de 10 ans. À 12 ans elle rencontre Cheik Abou El Mohamed et Zakaria Ahmed qui l’a prennent sous leur aile et l’emmèneront plus tard au Caire. Adolescente, elle continue à se produire en garçon dans les petits théâtres du Caire où elle évite toute mondanité. Elle rencontre le poète Ahmed Rami, qui l’initie à la littérature française et lui écrira 137 chansons, et Mohamed El Qasabji, un joueur de luth qui lui ouvre ouvre les portes du palais du théâtre arabe au milieu des années 20. Deux rencontres déterminantes dans sa carrière. C’est sur cette scène qu’elle chante ses premiers grands succès et les concerts étant gratuits cela contribue à la lancer et à faire sa renommée. En1932 elle connaît un tel succès en chantant, L’amoureux est trahi par ses yeux, quelle se produit déjà sur les grandes scènes à Damas, Bagdad, Beyrouth, Tripoli… Elle est encore aujourd’hui, considérée comme la plus grande voix du monde arabe !

Al-Atlal (Les ruines)

Écrite par Ibrahim Nadji, sur une composition de Ryad Essoumbati. Interprétée pour la première fois en 1966, elle est l’une des chansons d’amour les plus célèbres d’Oum Kalthoum.

 

ALGÉRIE

CINÉMA

LOUSS WARDA AL-RIMAL (ROSE DES SABLES)

MOHAMED RACHID BENHADJ (1949, noir et blanc)

Keltoum (la mère), Mohamed Chouikh (Lakhdar), Hassan Hassani (le père).

À 700 km d’Alger, en plein Sahara, une jeune femme Zined et son frère Moussa, infirme de naissance, vivent dans une oasis où ils tentent de survivre et de conserver tous les deux, une vie familiale que la guerre a détruite. Elle, travaille dans une usine de conditionnement de dattes et lui est un jeune homme plein de douceur qui aime secrètement Mériem. Zined, comme toutes les jeunes femmes, aimerait trouver un mari, mais elle ne peut l’envisager. Que deviendrait Moussa, qui arrose tous les jours une rose qui pousse dans le sable ? Une belle histoire de fratrie.

 

RIH AL-AWRAS (LE VENT DES AURÈS)

MOHAMED LAKHDAR-HAMINA (1966, noir et blanc)

Prix de la première Oeuvre au Festival de Cannes en 1967.

Un film très dur qui montre, comme un cri étouffé, l’amour d’une mère pour son fils. L’histoire se déroule pendant la colonisation française. Une mère, dont le mari a été tué par un bombardement, part à la recherche de son fils Lakhdar arrêté – il ravitaillait les maquisards en lutte pour la libération nationale – et emprisonné par l’armée française. Rien ne semble lui faire peur ni l’arrêter pour le retrouver. Déterminée, animée d’un courage et d’une force que seule peut avoir une mère dans de telles circonstances, elle va de camp en camp et son obstination finie par la mener où se trouve son fils. Tous les jours elle vient le voir de loin travailler, elle le regarde à distance. Un jour elle ne le voit plus et comprend que son enfant n’est plus de ce monde. De désespoir elle décide de le rejoindre… Une histoire poignante, inspirée de celle de la grand-mère du cinéaste.

 

LEILA WA AKHAWÂTUHA (LEILA ET LES AUTRES)

SID ALI MAZIF (1977)

Chafia Boudraa (mère de Mériem), Rabah Lechaa (Mohamed), Nadia Samir (Leïla), Aïda (Mériem), Zhara (Saâda, la marieuse).

Le combat de deux jeunes filles qui tentent de lutter contre leur subordination, un frein majeur à l’émancipation de la femme. Leïla est une jeune lycéenne qui refuse de se marier avec un homme qu’elle ne connaît pas, Mériem travaille dans une usine où elle subit un environnement machiste.

 

NALHA

FAROUK BELOUFA (1979)

Roger Assaf, Fayek Hamissi, Yasmine Khlat, Ahmed Mehrez, Youssef Sayeh.

Larbi, un journaliste algérien, part pour le Liban pour couvrir la guerre civile, il se retrouve confronté à diverses réalités locales. Dans ce chaos et cette situation complexe, il est comme happé par trois femmes au parcours très différent : Nahla, une chanteuse, Maha une journaliste et Hind une activiste palestinienne. Il assiste à l’ascension fulgurante de Nahla – véritable diva dont il est amoureux – et à sa chute. Elle perd soudain sa voix sur scène. Après ce drame, elle se réfugie chez son amie Maha et se referme sur elle-même. Larbi, fasciné par sa personnalité, se retrouve complètement déstabilisé.

 

RIÂH AL-RAMI (VENT DE SABLE)

MOHAMED LAKHDAR-HAMINA (1982)

Leïla Shenna, Albert Minski, Nadia Talbi, Nadir Benguedih, Sissani.

Le mariage est rarement une belle histoire d’amour, particulièrement dans le milieu rural algérien, car il est souvent synonyme de souffrance et d’enferment pour beaucoup de femmes qui subissent le poids des traditions. Au cœur de la palmeraie le simoun souffle et bouleverse tout sur son passage. Parmi les habitants, la femme d’Amara vient d’accoucher, mais ce qui devrait être un événement heureux tourne au drame : une huitième fille, une véritable malédiction ! Amara veut un fils, il n’en a que faire de toutes ces filles… Il bat et répudie sa femme et, ne supportant pas que ce bonheur lui soit refusé, il va décider de se venger. Le cinéaste a dédié ce film : « À ma mère qui a eu seize enfants ! »

UGHNIYAT AL-KHARIF (CHANT D’AUTOMNE)

MOHAMED MEZIANE YALA (1983)

Chikh Noureddine, André Thorrent, Abdelmadjid Fares, Laurence Jeanneret, Mohamed Sirat.

Au début de la guerre de Libération, l’histoire d’un amour impossible entre Catherine, fille de fermiers français, et Abdelmalek, fils d’un forgeron.

AL-QALAL’A (LA CITADELLE)

MOHAMED CHOUIKH (1988)

Djilali Ain-Teledes (Sidi), Fettouma Oulisha (Helima), Khaled Barkat (Kaddour), Fatima Beladhj (Nedjma).

Kaddour, beau et un peu simplet, est le fils adoptif d’un notable polygame du village. Comme tout un chacun, il rêve d’amour et parfois il regarde furtivement une femme qui apparaît à sa fenêtre et lui fait volontiers des yeux doux, mais elle est mariée. Le mari se plaint de son comportement, les rumeurs vont vite à la citadelle… Kaddour se trouve coincé entre deux mondes : celui des femmes avec lequel il vit et qui subissent la polygamie et le monde des hommes qui entendent bien continuer à imposer leurs droits et les traditions, par la violence si il le faut. Le jour où Kaddour proclame son amour, les vieux du village se mettent en tête de le marier dans la journée.

Mais dans l’impossibilité de lui trouver une femme, il décide de ruser car le mariage doit avoir lieu quand même. Quand le pauvre Kaddour découvre, au moment de sa nuit de noces, que la femme qu’il s’apprête à prendre dans ses bras n’est qu’un mannequin, la méchanceté des hommes l’anéanti. Il sort de sa chambre nuptiale avec sa femme dans les bras et tout le village, sauf les femmes, ri bien de la farce. Mais quand Kaddour se suicide les villageois restent sans voix…

 

AMOUR INTERDIT

SID ALI FETTAR (1993)

Isabelle Strawa, Alar Maarouf, Hamoud Loukkal.

Un soir, en 1955 dans un bal à Alger, Azzedinne tombe amoureux de Francine, une française issue d’un milieu bourgeois. Pour la séduire il se fait passer pour l’héritier d’une grande famille et choisit de se faire appeler Bruno. La supercherie sera-t-elle découverte ? De plus, la guerre couve, éclate, et leur amour semble impossible…

 

KEDACH ETHABNI, HOW BIG IS YOUR LOVE (COMBIEN TU M’AIMES)

FATMA ZHORA ZAMOUN (2011)

Nourdine Alane (Rachid), Nadjia Debahi-Laaraf (Khadija), Louiza Habani (Safia).

Rachid et Safia, qui vivent à Alger, forment un couple en crise. Ils confient leur fils Adel à ses grands-parents Lounés et Kahdija pour quelques jours. Une semaine passe, il rate l’école, une seconde puis une troisième semaine passe… Khadija est au petit soin pour son petit-fils, lui fait des petits plats, l’entoure de son affection comme Lounés qui l’initie au monde des animaux. En réalité les parents sont séparés et la mère, accusée d’infidélité, ne peut avoir la garde de son fils. Ce dernier va vivre cet éloignement comme un déracinement (coupé de son foyer, de son quartier et de son école), sans que personne ne lui donne d’explication. Adel et sa grand-mère adoucissent cette épreuve par les sentiments et se disent « combien tu m’aimes ? », pour se rassurer, se rapprocher l’un de l’autre et continuer le chemin de l’absence. Une très belle relation affective entre un petit-fils et sa grand-mère et aussi un grand-père qui apporte son lot d’attentions délicates, sans oublier le joli chardonneret auquel Adel voue une tendresse particulière.

 

LA PREUVE

AMOR HAKKAR (2014)

Nabir Asli (Ali), Anya Louanchi (Houria), Zineb Ahmidou (la Dame), Tounés Ait-Ali (Fatima)

Ali, chauffeur de taxi, est marié depuis deux ans avec Houria, veuve avec deux petites filles. Elle n’arrive pas à tomber enceinte, Ali s’inquiète et se demande si il n’est pas stérile. Sans le dire à sa femme, il fait un test qui lui apporte la preuve de sa stérilité. Il s’interroge. Comment affronter cette épreuve, quelles seront ses conséquences ? Doit-il le lui dire ou le cacher. Sa femme, ne risque-t-elle pas de ne plus le voir comme un homme, et son père qui espérait tant un descendant. Soudain tout joue contre lui. Une certaine Fatima, enceinte, affirme qu’il est le père du bébé. Houria le quitte. Doit-il lui avouer son infirmité ou subir une accusation d’infidélité ? Une infirmité, ressentie comme une véritable malédiction en Algérie, une honte que les hommes cachent. Dans un société patriarcale, ne pas avoir de descendant est une tare. Ce film traite d’un sujet délicat dans la société algérienne d’aujourd’hui.

 

LITTÉRATURE

ROMAN

L’amant imaginaire

TAOS AMROUCHE (1996)

Taos Amrouche (1913-1976) incarne la Kabylie éternelle. Toute sa vie elle a été considérée comme une marginale : elle attire, elle dérange. Première algérienne à publier un roman Jacinthe noire (1947), probablement trop tôt pour faire partie de la mouvance dite de la « génération 1952 ». De plus, la grande stature de son frère Jean, la place en seconde position. Elle recueille des contes et des proverbes dans Le Grain magique (1966) et surtout elle rassemble des chants ancestraux berbères quelle interprète et fait entendre dans le monde entier. Son dernier roman L’amant imaginaire (éd. Gallimard 1996) oscille entre la fiction et le récit autobiographique déguisé, une chronique intimiste.

Son livre l’Amant imaginaire est son dernier roman. « Abandonnée, je vois passer devant moi un cortège de terreurs. » Aména, la narratrice, aime deux hommes, lequel des deux lui offrira une issue ? Olivier, avec son cœur fou, qui la hante jour et nuit ? Ou Marcel qui la fuit et, elle le sait, qu’elle doit fuir ? Mais, au fond, n’est-ce pas la voix de Taos que l’on entend dans ce roman qui dévoile sa liaison amoureuse complexe et tourmentée avec un écrivain célèbre et la rencontre de son époux, le peintre André Bourdil ?

 

Ce que le jour doit à la nuit

YASMINA KHADRA

(éd. Julliard, 2008)

Ce livre célèbre, adapté au cinéma par Alexandre Arcady, n’est pas seulement une histoire d’amour entre Younés (rebaptisé Jonas pour se glisser au mieux parmi les colons) – qui est au collège à Oran et vit chez son oncle pharmacien – et Emilie, dont il est secrètement amoureux. C’est aussi une page, voire plusieurs pages, de la terrible histoire qui s’écrit entre l’Algérie et la France dans les années 60. Beaucoup plus tard, étudiant brillant, Jonas retrouve Emilie, mais la guerre d’indépendance commence. Amoureux, il en oublie presque la situation conflictuelle… Les extraits ci-dessous donnent le ton du livre et le contexte dramatique de l’époque dans lequel il se situe, il évoque aussi l’histoire de deux communautés qui aiment le même pays.

« Mon oncle me disait : Si une femme t’aimait, et si tu avais la présence d’esprit de mesurer l’étendue de ce privilège, aucune divinité ne t’arriverait à la cheville (…) Oran retenait son souffle en ce printemps 1962. La guerre engageait ses dernières folies. Je cherchais Emilie. J’avais peur pour elle. J’avais besoin d’elle. Je l’aimais et je revenais le lui prouver. Je me sentais en mesure de braver les ouragans, les tonnerres, l’ensemble des anathèmes et les misères du monde entier. »

 

POÉSIE

HEDDI ZERKI (1890-1949)

Née à Oued Souf, dans le Grand Sud algérien, Heddi Zerki a vécu son enfance et sa jeunesse en Algérie, puis est allée vivre en Tunisie. Elle est considérée comme la poétesse de la tendresse et de l’amour, son long poème La Bougie (Une anthologie des poésies arabes, éd. Thierry Magnier 2014), en est un bel exemple.

 

TUNISIE

CINÉMA

SEJNANE

ABDELLATIF BEN AMMAR (1974)

Tanit d’argent aux Journées cinématographiques de Carthage – Nourreddine Mahfoudh, Abdellatif Hamrouni, Bchira Cherif, Jamil Joudi, Mouheddine Mrad.

1952, pendant la colonisation française et l’année où débute la résistance armée qui conduira à l’indépendance 4 ans plus tard. Kemal, depuis l’assassinat de son père, s’interroge sur l’avenir de la Tunisie. Il est tiraillé entre sa prise de conscience politique contre la colonisation et ses sentiments pour Anissa qu’il rencontre dans l’imprimerie où il travaille.

Mais elle est déjà promise à un homme de 40 ans qu’elle ne connaît pas. Il décide de se lancer dans la rébellion et rejoint la lutte armée, mais sa participation à une manifestation de mineurs lui est fatale. Anissa épouse, contre sa volonté, cet homme riche. Le film met en parallèle la condition de la femme, qui subit le joug des traditions, et celle de la classe ouvrière qui, oppressée, défend l’intérêt du pays.

 

RIH AL-SADD (L’HOMME DE CENDRES)

NOURI BOUZID (1986)

Tanit d’or aux Journées cinématographiques de Carthage – Imed Maalal, (Hachemi), Khaled Ksouri (Farfat), Habb Belhadi (Touil).

Hachemi prépare son mariage avec une femme imposée par sa famille, mais cet événement réveille des souvenirs douloureux, un secret qu’il partage avec son ami Farfat. Ils ont tous les deux été violés à l’adolescence par Ameur, un contremaître libidineux. Hachemi vit mal ce lourd secret et à l’approche de son mariage il s’interroge sur sa virilité. Farfat, devenu homosexuel sans s’en cacher, est moqué par tous et il est chassé de chez lui par son père. Hachemi tente d’expliquer à son père qu’il ne veut pas se marier, la tension monte, il s’enfuit et part sur les traces de son passé. Sa mère tente de le retenir en l’incitant à participer à des rites magico religieux. Il retrouve une bande de jeunes et quand il voit Farfat, ils évoquent très souvent Ameur, ce qui le déstabilise. Hachemi, devenu sculpteur, se retranche dans son atelier. Ce film montre la fragilité des êtres à tous les âges, une réalité que bien souvent la société n’accepte pas. Elle met aussi en avant le poids de l’autorité du père et des traditions.

 

MAJNUN LEÏLA (LEÏLA MA RAISON)

TAÏEB LOUHICHI (1989)

Prix du public au Festival du cinéma d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine de Milan – Mouna Noureddine, Safy Boutella, Abderrahmane al-Rachi, Fatma ben Saidane, Tarık Akan.

Quand les critiques parlent de Taïeb Louhichi, ils disent souvent qu’il est un cinéaste de l’espace, en rapport à son attirance profonde pour le désert où il a tourné plusieurs films. Cet espace infini sert bien sûr de cadre grandiose à la poésie dans « Leïla ma raison ». Quays, fils de prince et poète, aime d’un amour fou Leïla et clame son amour, à qui veut l’entendre, à travers des poèmes dédiés à sa bien aimée. Il veut l’épouser, le père de Leïla ne s’y oppose pas, mais il ne peut accepter que Quays cri son amour, loue le corps et la beauté de sa fille publiquement…

 

REGAYA (COEUR NOMADE)

FITOURI BELHIBA (1990)

Grand prix de la communication interculturelle – Nadia Samir (Regaya), Ahmed Snoussi (Fettah), Ahmed Ben Smail.

Regaya, jeune et jolie, vit dans un village de pêcheurs au sud de la Tunisie. Veuve et traumatisée par la mort de son mari elle doit, selon la tradition, se remarier ce qu’elle refuse. Elle va tenter de vivre libre sans pour autant rejeter les traditions. Elle rencontre Fettah, avec lequel elle redécouvre un nouvel amour. Ils vont tenter de le vivre loin du regard des autres.

 

TAWK AL-HAMAMA Al-MAFQUD (LE COLLIER DE LA COLOMBE)

NACER KHÉMIR (1990)

Navin chowdry, Walid Arakji, Ninar Esber, Sonia Hochlaff, Chloé Rejon

Inspiré d’un des fameux contes des Mille et une Nuits, le film nous entraîne dans un voyage dans l’Andalousie musulmane du XIè siècle au cœur d’une citadelle imaginaire et d’un lacis de ruelles mystérieuses. Dans ce dédale, Zin se faufile partout. Il est le messager des amants et le seul à savoir qu’un singe s’est métamorphosé en prince. Il est aussi l’ami du jeune Hassan, le héros, qui étudie la poésie et la calligraphie à Cordoue. Ce dernier a trouvé une œuvre sacrée, incomplète, dont il cherche désespérément les feuillets manquants qui lui révéleraient les secrets de l’amour. Il cristallise sa soif d’absolu dans la recherche d’une image découverte sur un parchemin: celle de la princesse de Samarkande.

Nacer Kémir, réalisateur, écrivain et conteur, a interprété au théâtre de multiples fois des récits des Mille et une Nuits, une œuvre littéraire magistrale qui l’a toujours fasciné. La transposition à l’écran lui a permis de mettre en images la poésie, l’idéal de beauté, le raffinement et la sensualité qui émanent de ces récits.

 

SOLTANE EL MADINA (LE SULTAN DE LA MEDINAH)

MONCEF DHOUIB et MOHAMED BEN SMAÏL (1992)

Arkane Boujalabia, Hélène Catzaras, Mouna Noureddine, Hassiba Rochdi, Kamel Touati, Rim Turki.

Un mariage est rarement un événement heureux quand il se fait sous la contrainte, et la jeune Ramla va connaître la douleur de cette tradition. Depuis l’enfance elle a été destinée à son cousin Bab et il est temps maintenant de la marier, mais celui-ci est en prison. Peu importe, Ramla est emmenée par ses parents en ville, au cœur de la Médina de Tunis, chez sa future belle-mère qui vit dans une oudala, une grande maison qui abrite un groupe d’hommes, de femmes, d’enfants et de vieillards. Elle l’enferme dans une chambre en attendant le mariage. L’autre fils Fraj, simplet, habite les lieux et Ramla se lie d’amitié avec lui. Avec son aide, elle arrive à sortir secrètement, mais elle se retrouve dans la médina au milieu d’un univers d’hommes. Au fil des jours, ne supportant plus son enfermement, elle échafaude l’idée de s’évader. Fraj lui facilite les choses. Elle s’enfuit, se cache, mais sa tentative de liberté va échouer et s’achever en drame.

 

BEZNESS

NOURI BOUZID (1992)

Abdel Kechiche (Roufa), Jacques Penot (Fred), Ghalia Lacroix (Khomsa), Mustapha Adouani (le commissaire).

Un film dérangeant sur une réalité que l’on retrouve aux quatre coins du monde : le tourisme sexuel. Le cinéaste – victime de la censure pour ses films « L’Homme de cendres » (1986) et « Les Sabots d’or » (1989) a fait 5 ans de prison pour son travail jugé subversif – poursuit son oeuvre polémique.

Sur les plages de Tunisie se côtoient deux mondes aux modes de vie, principalement dans le registre des relations amoureuses et sexuelles, complètement opposés. Les occidentaux vivent en toute liberté, les Tunisiens sont écartelés entre tradition et modernité. Fred un reporter photographe arrive en Tunisie pour faire un reportage sur les bezness, de jeunes gigolos, qui vendent leurs charmes aux touristes, peu importe l’âge et le sexe… Il va découvrir, grâce à Roufa, une surprenante jeunesse tunisienne pleine de contradictions. Roufa en est lui même un excellent exemple, il est très permissif avec « sa clientèle » et très répressif envers sa famille et surtout sa jeune fiancée.

 

LES SILENCES DU PALAIS

MOUFIDA TLATLI (1994)

Hend Sabri (Alia jeune), Sami Bouajila (Lofti) Amel Hedhili (Khedija), Ghalia Lacroix (Alia adulte), Khedija ben Osman (Sarra).

Nous sommes en 1965, dix ans après l’indépendance. Au palais, une somptueuse demeure, l’amour résonne d’un drôle d’écho : soumission et enfermement pour les femmes, mi-maîtresses et mi-esclaves toutes à la volonté des princes. Qu’elles hantent les sous-sols – où elles s’affairent aux travaux du ménage, en cuisine à préparer les mets et les fêtes, ou qu’elles soient conviées à l’étage pour chanter, danser et se soumettre aux plaisirs du prince, – elles vivent enfermées, rient, pleurent, soupirent, crient quand elles enfantent…

Alia, chanteuse, a 25ans et gagne sa vie en chantant dans les mariages. Apprenant la mort du prince Sidi’Ali, elle part sur les traces de son passé et retourne dans ce palais en ruine où elle est née et d’où elle s’est échappée dix ans plus tôt. Khedija, sa mère, en voulant la protéger de la convoitise des hommes du palais, a perdu la vie. Alia, aujourd’hui enceinte d’un homme qui veut la faire avorter, à décider de se battre, de garder l’enfant et si c’est une fille elle l’appellera Khedija. Une bouleversante histoire de femmes portée à l’écran par une femme.

 

UN ÉTÉ À LA GOULETTE

FÉRID BOUGEDIR (1996)

Gamil Ratib (Hadj Beji), Mustapha Adouani (Youssef), Sonia Mankai (Mériem), Michel Boujenah (lui-même), Claudia Cardinale (elle-même), Ivo Salerno (Giuseppe).

L’été à la Goulette, une plage célèbre près de Tunis, c’est cool et l’amitié n’a pas de frontière y compris religieuse. Meriem, musulmane, Gigi, la juive et Tina, la sicilienne catholique sont inséparables.

Il en est de même pour leurs pères Youssef le musulman, qui travaille sur le petit train de la Goulette à Tunis, Jojo le juif, champion de la brick à l’œuf, et Giuseppe, un pêcheur sicilien catholique. Ils vivent dans le même immeuble et tout le monde s’entend à merveille jusqu’au jour où leurs filles jouent la provocation et décident de perdre leur virginité avec un garçon d’une autre religion que la leur. Le film ouvre un débat universel, pour que la pluralité culturelle et religieuse, la fraternité et la tolérance ne reculent pas en faveur d’une pensée et d’une religion unique.

 

LA SAISON DES HOMMES

MOUFIDA TLALI (1998)

Sélection « Un certain regard » à Cannes, prix de l’Institut du Monde Arabe) – Rabiaa Ben Abdallah (Aïcha), Ezzedine Gennoun (Saïd), Hend Sabri (Emna).

En voyageant en Tunisie, la femme me semblait plus libre dans sa vie sociale, professionnelle et sentimentale, à l’inverse d’autres pays arabes. Mais l’apparence, comme on le sait, est souvent trompeuse. C’est surtout le cas dans le milieu rural, même si nous sommes dans un lieu hautement touristique. La « saison des hommes », c’est en fait le retour des hommes partis travailler à Tunis, laissant leurs femmes seules à Djerba pendant onze mois de l’année, sous la tutelle de leur mère autoritaire. Puis ils rentrent pendant un mois.

Ce retour est attendu, souvent vécu comme une nouvelle nuit de noces par certaines femmes, mais le bonheur de l’attente et les préparatifs sont, dans bien des cas, plus importants que les retrouvailles. Aïcha a épousé Saïd à 18 ans et dès son mariage elle a manifesté le désir de partir avec lui à Tunis. Saïd a refusé, elle lui a proposé de mettre l’argent de côté, nécessaire au voyage, en vendant les beaux tapis qu’elle confectionne. Il accepte à condition qu’elle ait un fils. Elle aura deux filles et passera de longues années à attendre la saison des hommes…

La réalisatrice confie dans une interview à Olivier Barlet: « Ce que je voulais raconter, c’est que les femmes sont très responsables malgré elle de cet héritage qu’elles transmettent de fille en fille, et que si elles ne se décident d’arrêter cela un jour, ça ne s’arrêtera jamais (…) cependant, dans ce cas précis elle ajoute : «  je comprends les hommes : ils sont dans un système économique qui n’est pas viable, ils assurent ce qu’il faut pour qu’elles ne manquent de rien. Pourtant elles manquent de l’essentiel : elles sont toutes mal dans leur corps, et ce n’est pas un mois qui peut réparer les souffrances de ce corps. » Si une femme exprime un désir, murmure la demande d’une caresse, c’est un scandale pour un homme, irrecevable dans son esprit étroit : « jamais nos femmes ne nous ont dit ça ». Moufida Tlatli confie : « j’avais pensé comme titre pour mon film « J’ai mal dans mon corps », cela aurait été plus juste »

 

FATMA

KHALED GHORBAL (2001)

Prix de la Confédération Internationale du Cinéma d’Art et d’essai- Festival de Cannes 2001, Prix de la Tolérance au Festival de Rabat en 2001 – Aghdadi Aoun, Maurice Garrel, Nabila Guider, Awatef Jendoubi, Huguette Maillard, Amel Safta.

Fatma, orpheline de mère, s’est réfugiée dans le silence après avoir été violée par son cousin. À 17 ans elle part pour Tunis faire des études. Elle rencontre Mourad avec lequel elle fait l’amour, ils se séparent, et elle part comme institutrice dans un village. Là elle rencontre Aziz, médecin, c’est le coup de foudre. Ils veulent se marier mais avant, Fatma veut se faire recoudre l’hymen. Ils sont heureux et forment en apparence un couple harmonieux. Pourtant Fatma n’est pas heureuse. Certaines blessures ne cicatrisent pas, elle n’arrive pas à vivre, à rire, à s’épanouir sexuellement… On suit la métamorphose de Fatma, de l’adolescente, chargée de famille à la mort de sa mère, à la femme du médecin, en passant par l’étudiante libérée et la femme institutrice dans un village perdu. Un vrai portrait de femme. « Cette histoire est basée sur des faits réels. (…) La femme tunisienne reste confrontée à l’urgence de la prise de parole, laquelle est le meilleur rempart à toute tentation d’un retour nostalgique à des pratiques d’asservissement de la femme » (Khaled Ghorbal)

 

LE SATIN ROUGE

RAJA AMARI (2002)

Hiam Abbass (Lilia), Maher Kamoun (Chokri), Hend El Fahem (Salma), Monia Hichri (Folla)

La réalisatrice évoque deux tabous au Maghreb, l’image de la mère garante de la tradition et celui de la veuve. Lilia, veuve, élève seule sa fille. La croyant à la dérive et prête à faire des bêtises en étant amoureuse de Chokri, un musicien qui joue le soir dans un cabaret, elle décide de s’y rendre. Choquée, elle s’évanouit, puis reprenant ses esprits elle est fascinée par cet univers de la nuit et tous les soirs, elle revient au cabaret « le Satin rouge ». Dans ce monde de la danse, de la sensualité et des plaisirs elle redécouvre le désir, une sensation perdue depuis des années où elle a agit par devoir. La mère exemplaire et « rangée » bascule et devient danseuse de cabaret. Après des années de contrainte (voisinage oppressant, surveillance réciproque, peur du regard des autres…), d’hypocrisie ambiante (un oncle pratiquant qui, le soir, participe à des fêtes lubriques), elle se laisse aller (cheveux, coiffure, tenue vestimentaire…), et se sent redevenir femme.

 

AL-HADITHAH (L’ACCIDENT)

RACHID FERCHIOU (2007)

Manel Amara (Fatma), Mohamed Ali Ben Jemaa (Farés), Younes Ferhi, Sana Kassous (Zakia), Ali Khemeri, Fathi Messelmani, Khadija Souissi.

Farés rentre de la clinique où sa femme vient d’accoucher d’un beau garçon. Il est le plus heureux des hommes, tout semble lui sourire. De plus, il vient d’acquérir un taxi flambant neuf, en attendant d’avoir un poste qui corresponde à son niveau universitaire. Mais ce jour là le destin se mêle de sa vie. Une femme – belle et mystérieuse, vêtue de rouge et de noir – monte à son insu dans son taxi. Il est à mille lieux d’imaginer que cette rencontre va bouleverser sa vie et en changer le cours.

 

LE FIL

MEDHI BEN ATTIA (2010)

Antonin Stahly (Malik), Claudia Cardinale (la mère), Salim Kechiouche (Bilal), Ramla Ayari (Syrine), Driss Ramdi (Hakim).

De retour en Tunisie, après la mort de son père, Malik, la trentaine, retourne vivre chez sa mère. Il voudrait lui dire qu’il aime les hommes, mais impossible de lui faire un tel avoeu, alors il enchaîne mensonge sur mensonge. Lorsqu’il rencontre Bilal, tout devient possible : le jeune architecte, son amant et sa mère s’affranchissent des interdits pour embrasser pleinement la vie. Au coeur de l’été tunisien, chacun va trouver le bonheur auquel il aspirait depuis longtemps.

 

LITTÉRATURE

POÉSIE

ABDOU’L – QASIM AL – CHABI (1909-1934)

Un poète, dont on dit qu’il aurait probablement été l’un des grands poètes de son temps, si la mort ne l’avait pas fauchée à vingt cinq ans.

 

MES CHANSONS IVRES

Nous nous sommes enivrés de notre amour ;

en lui, nous nous sommes rassasiés.

Toi qui, à la ronde aux convives,

fais le geste à boire,

enlève la boisson et les coupes

Offre le chardon ardent

aux oiseaux,

aux abeilles,

et laisse la terre humide

enserrer ton épousée.

Qu’y a-t-il de commun

entre nous et les coupes, que nous quêtions ainsi

auprès d’elles l’étourdissement,

alors que la passion d’amour

est magie, ardent ivresse (…)

Tu ne vois que la séduction

du monde et des êtres vivants

qui le peuplent,

cela aussi des songes hantés de créatures

au coeur ensorcelé (…)

Et nous murmurons nos confidences

à l’oreille de la nature

dont le souffle se répand

dans la création entière ;

et nous écoutons battre son cœur

poursuivant son rythme chantant (…)

Au-dessus d’elle l’amour danse,

se divertit et chante.

Ivre et lançant des œillades

de familiarité coquette

Nous vivons le plus intense de notre vie

dans un Paradis façonné par la magie,

univers qui au loin dresse ses beautés…

au loin, si loin….

Oui, nous nous sommes enivrés de notre amour ;

en lui, nous nous sommes rassasiés.

Et la coupe a débordé.

Eloignez-vous les échansons ! (…)

 

MAROC

CINÉMA

EL CHERGUI (LE SILENCE VIOLENT)

MOUMEN SMIHI (1975)

Aïcha Chaïri, Khadija Moujahid, Majdouline Abdelkader Moutaa, Leila Shenna.

Tanger dans les années 1950, époque où elle est encore une concession internationale, mais ou l’heure de l’indépendance et de la réunification du pays est proche. Selon la tradition de la polygamie le mari d’Aicha – prostrée, malheureuse et silencieuse – s’apprête à prendre une deuxième épouse plus jeune. Pour l’en empêcher Aïcha a recours à la magie et elle se livre à une série de rituels (sacrifices, visites aux saints, sorcellerie) Les femmes qui l’entourent, dans sa famille comme ses voisines, la soutiennent et elles vont constituer ensemble une résistance secrète. Aïcha, pour afficher son sentiment de révolte, arrache son voile. Au cours d’un ultime rituel au bord de la mer, où elle doit s’immerger sept fois dans l’eau, elle se noie. Ce drame est celui de nombreuses femmes qui, au lendemain de l’indépendance, vont essayer de lutter pour leur émancipation et de sortir du carcan des traditions.

 

‘AR‘ IS MIN QAÇAB (POUPÉES DE ROSEAU)

JILLALI FERHATI (1981)

La petite Aïcha, mariée à peine sortie de l’enfance, est une jeune veuve. Selon la tradition elle doit se remarier avec un membre de sa belle-famille, en l’occurrence son beau-frère. Elle refuse, transgresse l’ordre établi, veut être libre, gagner sa vie et élever ses enfants. Mais elle apprend à ses dépens qu’une femme, même adulte, reste toujours mineure aux yeux de la loi. Quand elle est enceinte, sa famille la rejette. Privée de ses enfants et de son toit, elle n’a pas d’autre choix pour survivre que la prostitution.   De la petite fille à la veuve, en passant par l’épouse et la mère, de nombreuses femmes se reflètent dans le miroir d’Aïcha…

À propos de son film, le cinéaste nous dit : « Poupées de Roseau n’est pas exclusivement un film sur les femmes, c’est aussi un réquisitoire en faveur des êtres qui vivent l’humiliation. Mon choix quant à la réalisation de ce film dont le scénario est de Farida Benlyazid, est dû à la beauté, à la force et à la cohérence du sujet. Rien n’y est artificiel, ni inventé, c’est un fait divers, un fait qui ne manque pas de soulever l’indignation. Je n’ai jamais été aussi concerné et j’aurais aimé en dire bien plus sur ce que subit un être en proie aux institutions séculaires que sont les coutumes et les traditions, qui rendent l’homme fort et sûr de son bon droit. »

 

CHÂTI’ AL-ATFÂL AL-MAFQÛDIN (LA PLAGE DES ENFANTS PERDUS)

JILLALI FERHATI (1991)

Souad Ferhati (Mina), Mohamed Timod, Fatima Loukili, Larbi El Yacoubi, Mohamed Larbi Khazzan.

Mina tombe enceinte après avoir été abusée par son ami, qu’elle tue et cache sous une montagne de sel. Elle a le courage d’affronter son père et sa belle-mère qui la déteste. Comme elle a fauté, son père l’enferme dans une villa vide, bien qu’il souffre de cette décision. Mina attend son enfant, recluse à l’écart du village, tandis que sa belle-mère, considérée pourtant comme stérile, affiche un ventre rond : elle s’est appropriée la maternité de sa belle-fille. Après la naissance, Mina trouvera-t-elle la force de vivre, d’exister, de crier la vérité à tout le village ?

«  J’ai voulu raconter une histoire universelle qui touche le cœur de chacun, quelle que soit sa culture ou son origine. La dissimulation n’est pas spécifique à la tradition arabe. La peur du scandale est partagée par toutes les sociétés. Ce qui m’intéresse, c’est le secret, celui qui lie la fille et le père, celui de la belle-mère, celui des habitants du village qui se livrent à la contrebande. La mer est un secret, le sel respire un secret. Alors que le cinéma arabe se montre plutôt bavard, j’ai choisi la sobriété pour ramener les spectateurs à l’essentiel, la vérité des personnages. Je suis un peintre frustré. Par le cinéma, je rassemble peinture et écriture. » (Jillali Ferhati)

 

HUBBUN FI-DÂR AL-BAÏDHA (UN AMOUR À CASABLANCA)

ABDELKADER LAGTAÂ (1992)

Ahmed Naji (Jalil), Mouna Fettou (Saloua), Mohamed Zouhir (Najib).

A propos de ses films « Un amour à Casablanca » et « la Porte close » écoutons ce que le cinéaste a à nous dire : « J’ai essayé d’interroger certains tabous relatifs à la relation amoureuse (…) ce qui m’a amené à être régulièrement confronté à la censure. »

Après la mort de sa mère et la fugue de sa sœur Saloua, une jeune lycéenne de 18 ans, se retrouve seule entre son père autoritaire et sa belle-mère … Elle rencontre un homme marié, dont le couple bat de l’aile, auquel elle s’attache. Il a la cinquantaine grisonnante et elle devient sa maîtresse, mais elle se rend vite compte qu’elle ne désire pas faire sa vie avec cet homme. Elle rencontre Najil, un jeune photographe, dont elle tombe amoureuse. Tiraillée entre ces deux relations amoureuses et des sentiments pour l’un comme pour l’autre, elle décide d’avouer à ses amants son dilemme : c’est le drame !

Ce film est considéré comme le premier film marocain qui ose parler de sexe pour mieux parler d’amour et des tabous. Le cinéaste, qui prend le parti de dévoiler un sein ou un corps en maillot, provoque l’admiration chez les uns, le scandale chez les autres. «  Pourtant, précise Meriem Oudghiri, nul n’est scandalisé par la projection de films « érotiques » dans certaines salles de Casablanca tant que les acteurs sont européens. »

Abdelkader Lagtaâ lors d’une interview s’explique : « J’ai voulu travailler sur les tabous et les non-dits et voir jusqu’à quelle limite on pouvait les bousculer  (…) il y a un certain nombre de mutations que nous n’arrivons pas à maîtriser particulièrement au niveau du couple, notion récente dans notre société, où domine la non-communication (…) : « S’il y a une loi qui interdit d’aimer, alors je suis en infraction », vocifère l’un des acteurs dans le film. Cet Amour interdit, ce désir occulté revient inlassablement et constitue le leitmotiv d’un Amour à Casablanca : « Car l’Amour libre » accepté en Europe n’a aucune existence légale dans notre société, la hantise d’être « arrêté » et inculpé pour « délit de prostitution » (fassad) y apparait. « La nudité existe dans mon film et s’arrête là où la censure permet d’aller ».

 

AL-BÂB AL-MASDÛD (LA PORTE CLOSE)

ABDELKADER LAGTAÂ (1998)

Mohamed Zouhir, Mireille Creisson, Malika Rouimi, Salaheddine ben Moussa, Nadia El Jaouhari.

Saïd, la trentaine, vit à Casablanca avec sa belle-mère séparée de son père. Elle s’oppose à sa relation avec Hayat, l’une de ses collègues de travail. Il l’a rejoint à son insu, mais Hayat lasse de ses hésitations le quitte pour un autre homme. Saïd rencontre Faty, une jeune marocaine qui vit avec sa famille en France et il s’éprend d’elle. Faty comprenant son désarroi, l’aide à se dégager de l’emprise de sa marâtre et à retrouver son père pour mieux prendre sa vie en main.

 

SAMIRA FI DAYÂA (LES JARDINS DE SAMIRA)

LATIF LAHLOU (2007)

Sana Mouziane (Samira), Mohamed Khouyi (Idriss), Youssef Britel (Farouk).

Samira, comme toutes les jeunes femmes rêvent de se marier. Son père cherche pour elle un prétendant, il trouve Idriss, un exploitant agricole veuf et sans enfant. Une nouvelle vie commence pour la jolie Samira, mais cependant elle s’inquiète de voir son mari distant avec elle. Elle comprend qu’il l’a épousé pour s’occuper de son père, grabataire et âgé, aux côtés de son neveu Farouk. Puis Samira comprend que son mari est impuissant. Désemparée, elle rêve et fantasme devant le jeune Farouk qui semble apeuré quand elle tente de lui jeter des regards tendres, que leurs mains s’effleurent… Ils vivent une relation foudroyante, mais son mari ne tarde pas à le deviner. Il chasse son neveu sans ménagement, malgré l’intervention de sa femme, qui se retrouve seule, désespérée, prisonnière et condamnée à vivre dans une profonde solitude affective.

 

HIJAB EL-HOB (AMOURS VOILÉES)

AZIZ SALMY  (2008)

Mansour Badri, Hayet Belhalloufi (Batoul), Aziz Hattab, Saâdia Ladib, Younès Megri (Hamza), Amina Rachid, Houda Sedki.

Batoul, une jeune femme médecin de 28 ans issue d’un milieu bourgeois conservateur, est épanouie et tout semble lui réussir. Mais le jour où elle rencontre Hamza sa vie est bouleversée. Elle découvre l’amour et, prise dans le vertige qu’il suscite, elle ne résiste pas à avoir une relation amoureuse hors mariage au mépris des conventions sociales et des principes qu’elle a toujours revendiqués. Elle souhaite se marier mais Hamza refuse et veut rester libre. Ce film a fait l’objet d’une vive polémique et a failli être interdit, parce que l’héroïne porte le voile, toute une symbolique, et qu’une relation sexuelle est illégale avant le mariage. Aux critiques virulentes le cinéaste répond : « avoir voulu dénoncer une certaine hypocrisie de la société marocaine, qui n’hésiterait pas à transgresser les principes qu’elle défend. »

 

FISSURES

HICHAM AYOUCH (2009)

Abdelsellem Bounouacha (Abdelsellem), Noureddine Denoul (Noureddine), Marcela Moura (Marcela).

Un étrange trio, deux hommes et une femme, en quête d’amour se croisent, partagent et vivent des relations complexes à Tanger, une ville envoûtante et mystérieuse. Abdelsellem, un sexagénaire tout juste sorti de prison, est accueilli par son ami Noureddine, architecte amateur d’art et de poésie ; Marcela, artiste-peintre brésilienne, traîne un mal de vivre qui la rend suicidaire. Femme libre, indépendante, fantasque et écorchée vive, elle connaît des aventures qui l’entraînent parfois au bord de la folie. Marcela et Abdelsellem se rencontrent fortuitement dans un bar et deux jours plus tard ils vivent une relation amoureuse torride. Mais quand Marcela rencontre Noureddine les relations se compliquent. Des moments forts et pleins d’émotion, des instants de désespoir, de désillusions, de violence. Un trio, pris dans un tourbillon de la vie et des sentiments, qui tente en vain de partager leur amitié et leur amour…

 

JNAH L’HWA (LES AILES DE L’AMOUR)

ABDELHAI LARAKI (2011)

Prix du Meilleur Film Arabe au Festival du Cinéma d’Auteur de Rabat 2011 – Libre adaptation du roman Morceaux de choix de Mohamed Nedali – Omar Lotfi (Thami, Prix du meilleur acteur au Festival National du Film de Tanger), Ouidad Elma (Zined), Driss Rokhe (le Mokkadem), Abdou El Mesnaoui (le père), Zahira Sadik (Rehma), Fatema Tihihit (la mère), Nissrin Erradi, Mehdi Foulane (Omar), Amal Ayouch (hadja Hlima).

Thami est jeune et son père Adel est autoritaire et conservateur. Il exerce le métier de boucher au cœur de la Médina de Casablanca et, en manipulant la viande, il découvre une certaine sensualité qui peu à peu l’éveille à la sensualité féminine, à l’amour. Il rencontre Zined, une jolie femme, ave lequel il partage une passion charnelle et une romance interdite. Ce film évoque une quête de liberté et d’émancipation, qui passe par l’amour de Thami et de Zineb, dans le Maroc d’aujourd’hui, un pays en pleine mutation.

 

LA MOITIÉ DU CIEL

ABDELKADER LAGTAÂ (2014)

Prix des Droits de l’Homme au Festival international du cinéma méditerranéen de Tétouan – Sonia Okacha (Jocelyne),  Anas El baz (Abdellatif Laâbi),  Boutaina El Fekkak (Kenza), Marc  Samuel (Abraham Serfaty).

Si vous me demandiez, ce film est-il un film d’amour ? Je répondrais non puis oui. Non, parce qu’il évoque les années 70, dites « de plomb », une époque sensible dans l’histoire du Maroc, marquées par une terrible répression envers ceux qui défendent la démocratie, la liberté d’expression, les droits de l’homme etc.

Oui parce que ce film explore le drame et le combat d’une femme libre qui, comme de nombreuses femmes et familles, ont vécu un enfer, suite à l’incarcération arbitraire des leurs. Il raconte l’histoire autobiographique de Jocelyne Laâbi – l’épouse du poète Abdelatif Laâbi, directeur de la revue contestataire Souffles – qui s’est mobilisée pour la libération de son mari arrêté pour délit d’opinion, torturé et condamné à dix ans de prison. L’énergie, la détermination et le courage dont elle a fait preuve pour assister son mari pendant des années sont remarquables. Cela doit s’appeler tout simplement l’amour…

L’ECHARPE ROUGE

MOHAMED LYOUNSI (2015)

Mohamed Bastaoui (Lahbib), Karim Saidi, Yousra Tarik.

Lahbib, marocain, conduit sa femme Louisa, algérienne, sur le point d’accoucher dans le dispensaire le plus proche. Ce jour là, éclate la guerre des sables, mais Lahbib inquiet et troublé pat cette première naissance, ne s’aperçoit de rien. Les infirmières lui demandent d’aller chercher la layette pour le bébé, il repart et sur la route du retour il est contrôlé par des militaires. Le climat de tension entre le Maroc et l’Algérie a entrainé la fermeture des frontières. Quand les militaires voient sur ses papiers qu’il est marocain, ils l’expédient manu militari à Oujda, de l’autre côté de la frontière.

La jolie Louisa, restée en Algérie avec sa fille Aya, tente de survivre, mais dans une société algérienne où une femme ne doit pas rester seule, elle subit le harcèlement de divers prétendants auxquels elle résiste. Quant à Lahbib, il est embauché dans une ferme française et résiste lui aussi à toutes les tentations, notamment celle de refaire sa vie avec  une autre femme. Les familles séparées peuvent se retrouver une fois par semaine dans un no man’s land, derrière des barbelés, comme dans un parloir de prison, avec des militaires qui montent la garde. À cette occasion Louisa brandit l’écharpe rouge de son mari, comme un mouchoir ou un étendard, dans l’espoir que ce conflit et leur séparation cessent.

 

LITTÉRATURE

ROMAN

 

L’enfant de sable

TAHAR BEN JELLOUN

(éd. Du Seuil 1985)

C’est le premier livre que j’ai lu de Tahar Ben Jelloun, une lecture dont la belle écriture m’a profondément séduite et dont l’histoire m’a interpellée par l’étrangeté du personnage, héros particulièrement touchant et pris dans le carcan d’une fausse identité liée à une cruelle tradition.

Un livre-conte, qui restitue une parole vivante sur la place publique, et évoque l’art de conter comme on le pratiquait pour les Mille et Une nuits. Le conteur invite à l’écoute du récit qui, de la « la Porte du jeudi », conduit au bout de la nuit à la « Septième Porte ». Le récit suit les pages d’un cahier, ou plutôt d’un « Journal intime », laissé par le héros de l’histoire.

Hadj Ahmed a sept fille et sa femme attend son huitième enfant. Elle a mis au monde sept filles, une calamité ! Il faut donc que ce soit un garçon. Elle enfante d’une fille, qu’à cela ne tienne Hadj Ahmed décide que ce sera un garçon (seule sa femme et la sage-femme sont dans le secret), pour le reste de la population c’est un garçon et il reçoit le nom d’Ahmed. On organise une somptueuse fête pour l’évènement. L’enfant grandit, il côtoie le hammam avec les femmes jusqu’au jour où , devenu trop grand (e), il doit fréquenter celui des hommes. Une bande de tissu serre sa poitrine pour empêcher l’épanouissement des seins… À L’âge de l’adolescence, le journal d’Ahmed, comporte des pages blanches, un vide en quelque sorte…

A vingt ans, son identité lui appartient. Cultivé et autoritaire, il continue cependant à jouer le jeu et il épouse Fatima, une cousine malade. Ahmed entretient une relation épistolaire avec un mystérieux correspondant, tenu au courant de la vérité de sa situation. A la mort de son père, Amhed se retrouve seul avec son secret qu‘il partage désormais avec Fatima. Veuf, Amhed se referme. Epuisé par ce silence et cette solitude, il sort et on le retrouve plus tard engagé dans un cirque, où il exécute un morceau d’homme viril qui se métamorphose en femme fatale, sous le nom de Lalla Zahra. Il devient la principale attraction du spectacle !

Soudain le conteur s’est tu. Il a disparu depuis 8 mois. On le retrouve mort prés d’une source tarie. Il serre contre sa poitrine le journal intime d’Ahmed Zharra, qui sera brûlé par la police. Ce livre pose une question de fond dans la société magrébine où naître fille est une calamité « un malheur que l’on dépose négligemment sur le chemin par lequel la mort passe en fin de journée ». Les deux femmes Fatima, infirme et sans épanouissement sexuel, et Ahmed, femme-homme, qui vit avec une blessure permanente, symbolisent l’oppression.

 

POÉSIE

IBN SAHL (XIIIè siècle)

Ibn Sahl, né à Séville en 1210, est un poète juif converti à l ‘islam. Il passe sa jeunesse en Andalousie, mais après avoir résidé à Minorque il s’installe au Maroc où il est secrétaire du prince et où il se serait noyé avec le fils de ce dernier en 1251. Il est considéré comme un important poète arabo-andalou.

Une heure avec elle

Mon chagrin est certain : ces yeux-là se le disent,

Dans les mains du chagrin, mes rênes sont remises.

Elle était là, je croyais bien tenir ma proie :

Content suis-je aujourd’hui d’en retenir le rêve.

J’ai cédé au désir de mes yeux qui m’achève :

Yeux clos, je n’aurais pas à me mordre les doigts.

À qui dois-je ce corps dont je me plains, dolent,

Ce cœur qui dit ma plainte avec ses battements ?

Je n’ai pu jusqu’ici survivre qu’en secret,

Je restais en des lieux que la mort ignorait.

Je donnerais ma vie, autant qu’en eu Noé,

Pour une heure avec elle, et je serais comblé.

Pour cette lèvre, eau vive, ah ! je paierais, gagnant,

De mes jeunes années l’eau vive et le printemps !

Quand le désespoir dit, en secret : Non, jamais,

Ma rêverie répond : peut-être bien, qui sait ?

Ce qui console, amis, je ne le connais pas.

Mais l’amour vous voulez savoir ? Demandez-moi !

Prenez donc tous les morts depuis qu’est né l’amour :

S’il en a tué un, c’était moi le second.

Où est le plus aimant des amants ? Je réponds :

« Ne cherchez pas c’est moi ; sinon, cherchez toujours » »

Une anthologie des poésies arabes (éd. Thierry Magnier 2014)

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